Datenscraping sur Facebook : la Cour d’appel de Francfort accorde 200 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral
Par un arrêt du 24 avril 2024 (réf. 6 U 79/23), la Cour d’appel de Francfort-sur-le-Main a précisé que les personnes concernées pouvaient bénéficier d’un droit à réparation du préjudice moral en cas d’utilisation et de transmission illicites de données à caractère personnel par ce qu’on appelle le « datenscraping ». Cette décision éclaire des questions centrales du droit européen de la protection des données ainsi que leurs répercussions pratiques, notamment dans l’environnement des réseaux sociaux de grande ampleur. Cette analyse traite du jugement, de ses antécédents et de sa portée pour les entreprises, les opérateurs de plateformes et les particuliers concernés.
Contexte de la procédure : ampleur massive de l’extraction de données
L’arrêt de la Cour d’appel de Francfort porte sur l’utilisation non autorisée d’informations à caractère personnel de plus de 500 millions d’utilisateurs Facebook, dont les coordonnées ont été extraites de façon automatisée par des scrapers, puis publiées sur Internet. Le demandeur a fait valoir que son numéro de téléphone mobile avait été collecté et rendu accessible au moyen de procédés automatisés, sans son consentement. Selon le tribunal, cette pratique enfreint les dispositions du Règlement général sur la protection des données (RGPD).
Dimensions techniques et juridiques du datenscraping
Le scraping recourt à des moyens techniques permettant d’extraire automatiquement des informations publiques à partir de services en ligne. Ces activités ciblent souvent de grandes plateformes telles que Facebook, qui conservent un grand nombre de données sensibles. Parce que certaines informations de contact peuvent devenir accessibles involontairement par la combinaison de paramètres spécifiques, les personnes concernées encourent un risque important d’abus.
Considérations essentielles de la Cour d’appel de Francfort
Interprétation de la notion de préjudice moral
La décision porte principalement sur l’interprétation du préjudice moral au sens de l’article 82 du RGPD. La cour a précisé que la publication illicite de données de contact à caractère personnel pouvait déjà ouvrir droit à réparation. Contrairement aux dommages physiques ou matériels, une simple atteinte objective à un bien juridique suffit pour le préjudice moral – notamment une perte de contrôle sur les propres données ou le risque d’une utilisation abusive ultérieure.
La Cour d’appel de Francfort souligne qu’il n’est pas nécessaire de prouver des conséquences telles que l’usurpation d’identité ou des messages de spam pour fonder le droit à réparation. Il suffit en effet d’établir qu’une divulgation des données a porté atteinte à l’intérêt de confidentialité, de protection et d’intégrité.
Montant du dédommagement et sa justification
La somme accordée de 200 euros peut sembler modeste au regard du nombre de personnes concernées. La cour a cependant expliqué qu’elle reflétait l’ampleur concrète de l’atteinte, notamment en présence d’incidents isolés sans séquelles prouvées. Il a par ailleurs été souligné que des mesures de sécurité conformes au RGPD ainsi que des paramètres transparents sont essentiels de la part des opérateurs de plateformes pour éviter de telles violations.
Responsabilité des opérateurs de plateformes
Le jugement souligne les exigences élevées imposées aux responsables du traitement dans le cadre du RGPD. Les exploitants de grands réseaux sociaux doivent mettre en place des mesures techniques et organisationnelles appropriées pour empêcher l’extraction et la diffusion non autorisées de données des utilisateurs. L’absence de mécanismes de protection appropriés suffit déjà à constituer un manquement aux obligations en matière de protection des données et à entraîner des droits à réparation pour les personnes concernées.
Pertinence pour les entreprises et les particuliers
Pour les entreprises et les utilisateurs institutionnels de plateformes, la décision de la Cour d’appel de Francfort implique de vastes conséquences. D’une part, les responsables sont à nouveau avertis de leurs obligations étendues en matière de traitement des données à caractère personnel. D’autre part, la décision démontre qu’une atteinte à la protection des données même relativement mineure peut ouvrir droit à réparation – un facteur susceptible d’entraîner rapidement des montants importants en cas d’incidents de masse.
Le jugement rappelle également aux personnes dont les données sont concernées que les violations de la protection des données ne restent pas sans conséquence et que les tribunaux peuvent leur accorder un dédommagement chiffrable.
Appréciation et portée pour les procédures à venir
La décision de la Cour d’appel de Francfort s’inscrit dans la jurisprudence actuelle relative au RGPD, où les tribunaux sanctionnent de plus en plus les violations des obligations en matière de protection des données même en l’absence de préjudices individuels de grande ampleur. La question du montant approprié du dédommagement pour préjudice moral reste néanmoins une appréciation au cas par cas, dans laquelle l’étendue et la gravité de la violation sont déterminantes. Il faut s’attendre à ce que cette évolution jurisprudentielle prenne encore plus d’importance, en particulier pour les actions collectives, procédures de groupe et violations du droit de la protection des données à l’avenir.
Perspectives complémentaires
Entreprises et particuliers sont également appelés, face à ces évolutions, à se familiariser avec les règles actuelles, les conceptions juridiques récentes et les exigences techniques en matière de protection des données à caractère personnel. La dynamique particulière de l’innovation technique et l’évolution constante des plateformes de communication numériques imposent une veille permanente des évolutions du droit de la protection des données.
Si vous avez, au sujet de cette thématique ou de situations similaires, d’autres questions, il est recommandé d’examiner soigneusement le cadre juridique en vigueur ainsi que les options d’action correspondantes. Les Rechtsanwälte de MTR Legal mettent leur longue expérience à votre disposition afin de vous accompagner dans toute question individuelle relative à la protection des données à caractère personnel, aux demandes d’indemnisation et aux exigences de conformité.