Lexique juridique

Trust

Notion et fondements du trust en droit

Définition

La notion de trust provient à l’origine de la sphère juridique anglo-saxonne ; en allemand, elle se rapproche le plus des concepts de « fiducie », « fondation » ou « séparation de patrimoine ». Au sens juridique, le trust désigne une institution juridique selon laquelle une personne (le « settlor ») transfère la propriété de certains actifs à une autre personne (le « trustee ») qui les administre au profit d’un ou plusieurs bénéficiaires (beneficiaries) ou pour un but spécifique.

Développement historique

Le trust s’est développé dans le droit anglais au Moyen Âge comme un instrument de contournement du strict Common Law par le tribunal royal de l’Equity. Il visait notamment à protéger les patrimoines familiaux ou à les détenir à titre fiduciaire pour des tiers. La structure flexible du trust a permis de nombreux domaines d’application et a été, avec le temps, adaptée dans d’autres systèmes juridiques, même si, en dehors du Common Law, cela s’est fait sous différentes formes.

Caractéristiques essentielles du trust

Parties impliquées

Un trust typique requiert la participation d’au moins trois parties :

  • Settlor : la personne qui apporte le patrimoine au sein du trust.
  • Trustee : la personne ou l’institution à qui le patrimoine est transféré et confié pour une gestion fiduciaire.
  • Beneficiary : la personne ou le groupe de personnes bénéficiaires pour lesquels le patrimoine du trust est géré.

Dans certains cas, il est également possible d’instituer un protector qui détient certains droits de contrôle sur l’activité du trustee.

Structure et nature juridique

Le patrimoine transféré (fonds du trust) est, du fait de la création du trust, légalement séparé du patrimoine propre du trustee. Le trustee en devient certes le propriétaire formel, mais il ne peut en disposer que dans l’intérêt des bénéficiaires. Le trust crée ainsi une séparation entre la propriété juridique (legal ownership) et la propriété économique (beneficial ownership).

Une particularité réside dans la force obligatoire : Le trustee est tenu de respecter les conditions du trust et est personnellement responsable en cas de manquement à ses obligations.

Le trust en comparaison internationale

Systèmes de Common Law

Dans des pays tels que l’Angleterre, les États-Unis, le Canada, l’Australie ou la Nouvelle-Zélande, le trust est une structure juridique autonome solidement établie. Il existe ici des réglementations détaillées, par exemple dans le Trustee Act 2000 (UK) ou dans le Uniform Trust Code (USA), qui offrent de nombreuses possibilités de structuration et de mécanismes de protection.

Systèmes de droit civil

Dans le droit continental, il n’existe pas d’instituts équivalents. Les modèles les plus proches sont des constructions telles que la fiducie, la fondation ou le compte fiduciaire. Selon la Convention de La Haye sur la loi applicable aux trusts et sur leur reconnaissance (1985), les trusts sont cependant reconnus également dans des États de droit civil tels que l’Allemagne, à condition qu’il existe au moins un lien avec un État de trusts.

Formes typiques de trust en droit

Express Trust

L’ Express Trust express trust

Implied Trust

Ein Implied Trust naît de manière implicite lorsque les circonstances révèlent une relation fiduciaire sans qu’il y ait une déclaration expresse.

Resulting Trust et Constructive Trust

  • Resulting Trust : Un trust qui naît du fait que des biens sont restitués au settlor faute de disposition expresse.
  • Constructive Trust : Une fiducie ordonnée par le tribunal, souvent à des fins d’exécution du droit ou de préservation de patrimoine.

Création et liquidation d’un trust

Conditions de création

La création d’un trust exige généralement :

  • Intention déterminée (intention) du settlor
  • Désignation des biens du trust (subject matter)
  • Définition des bénéficiaires (objects)
  • Respect des conditions formelles (selon la juridiction)
  • Transfert des actifs au trustee

Cessation du trust

Un trust prend fin soit

  • à l’expiration d’une période déterminée,
  • à la survenance d’une condition résolutoire,
  • par la distribution complète des actifs,
  • sur décision judiciaire, notamment en cas de disparition du but ou d’impossibilité d’exécution.

Droits et obligations des parties

Droits et obligations du trustee

Le trustee est tenu,

  • de gérer le patrimoine comme bien d’autrui,
  • de respecter les conditions du trust,
  • d’agir dans l’intérêt supérieur des bénéficiaires (obligation fiduciaire),
  • de rendre compte de manière transparente,
  • d’éviter tout conflit d’intérêts.

Les trustees sont responsables en cas de manquement à leurs obligations et peuvent être poursuivis en dommages-intérêts, restitution d’avantages patrimoniaux injustifiés ou révocation.

Droits des bénéficiaires

Les bénéficiaires ont le droit,

  • d’exiger le respect du trust,
  • d’obtenir information et renseignement,
  • le cas échéant de recourir en justice.

Les droits diffèrent selon que le trust confère aux bénéficiaires un droit fixe (fixed trust) ou seulement une possibilité d’attribution (discretionary trust).

Le trust en droit fiscal, protection du patrimoine et planification successorale

Traitement fiscal

Le traitement fiscal des trusts est complexe et varie fortement d’un système juridique à l’autre. L’élément central repose sur la distinction entre trust transparent et non transparent. Cela a notamment une incidence sur :

  • L’imposition sur le revenu des trustees et des bénéficiaires
  • Conséquences fiscales en matière de droits de succession et de donation lors de la création, du transfert ou de la dissolution
  • Applicabilité des conventions de double imposition

Le trust comme instrument de protection du patrimoine

Le trust permet de

  • protéger le patrimoine contre les créanciers,
  • éviter les conflits familiaux,
  • organiser la succession et
  • préserver le patrimoine entre les générations.

Utilisation dans un contexte international

En particulier dans un contexte international – notamment s’agissant de biens immobiliers, de participations sociétaires ou de patrimoines familiaux avec des liens transfrontaliers – le trust constitue un outil fréquent pour la structuration et la gestion du patrimoine.

Reconnaissance et exécution des trusts en droit allemand

Convention de La Haye sur le trust

Par la Convention de La Haye sur la loi applicable aux trusts et sur leur reconnaissance le droit allemand reconnaît également les trusts, à condition qu’ils aient été valablement constitués conformément au droit d’un État de trust. Cette reconnaissance n’affecte toutefois pas nécessairement le traitement fiscal ou successoral selon le droit allemand.

Différenciation par rapport aux institutions allemandes telles que la fiducie et la fondation

Bien que la fiducie et la fondation allemandes présentent certaines similarités avec le trust, il existe des différences essentielles en matière de structure, de flexibilité et de protection juridique. Le trust offre une plus grande latitude de structuration privée et confère au trustee des obligations particulières de loyauté et de responsabilité.

Jurisprudence et réformes

Dans le débat international, les trusts gagnent en importance dans les situations transfrontalières. Les juridictions nationales et européennes ont rendu un grand nombre de décisions ces dernières années sur des questions de reconnaissance, d’interprétation et de liquidation des trusts. Des réformes législatives sont également débattues afin de clarifier davantage le rapport entre trusts et les institutions patrimoniales civiles traditionnelles.

Résumé

Le trust est une institution juridique complexe et variée du Common Law, qui joue un rôle majeur dans les relations juridiques internationales et dans la structuration du patrimoine. Ses principales caractéristiques sont la séparation nette entre propriété juridique et propriété économique, sa grande flexibilité et les obligations étendues du trustee. La reconnaissance des trusts dans le droit allemand prend une importance croissante, même s’il est toujours nécessaire d’examiner les implications fiscales, successorales et sociétaires.

Questions fréquentes

Quelles sont les conditions juridiques applicables à la création d’un trust dans une perspective internationale ?

Les conditions juridiques applicables à la création d’un trust varient fortement d’une juridiction à l’autre. Le trust trouve ses origines dans la sphère juridique anglo-américaine, notamment dans le Common Law. Dans des pays comme la Grande-Bretagne, les États-Unis, le Canada, l’Australie ou la Nouvelle-Zélande, la création d’un trust est encadrée par des règles légales précises (par exemple Trustee Act, Trusts Act), concernant notamment la forme, le transfert des actifs au trustee, la désignation des bénéficiaires (beneficiaries) et des trustees, ainsi que la définition des conditions du trust dans le « Trust Deed ». En revanche, il n’existe pas en droit allemand d’équivalent au trust anglo-américain. On s’appuie plutôt sur des institutions comme la fondation ou la fiducie de l’article 870 BGB. Toutefois, le droit allemand reconnaît les trusts dans certaines situations conformément aux règles du droit international privé, la Convention de La Haye sur la loi applicable aux trusts et leur reconnaissance (Hague Trust Convention) étant déterminante. Cette convention règle les conditions dans lesquelles un trust constitué à l’étranger est reconnu juridiquement dans les États parties. Les points essentiels concernent l’identification claire du patrimoine du trust, la détermination des bénéficiaires et les obligations du trustee. Dans les systèmes de droit civil comme l’Allemagne, l’Autriche ou la France, le droit des trusts repose le plus souvent sur des bases contractuelles ou de fondation et obéit à des règles différentes en matière de séparation du patrimoine, de droits de disposition et de protection des créanciers. Une constitution ou utilisation transfrontalière de structures de trust doit donc toujours être examinée avec soin.

Quels sont les aspects fiscaux à prendre en compte lors de la création et de la gestion d’un trust ?

Le traitement fiscal d’un trust est très complexe et varie selon l’État d’implantation du trust, la résidence du settlor (créateur), des bénéficiaires et du trustee, ainsi que la nature et l’importance des biens transférés. Dans les pays de Common Law, il existe des distinctions entre trusts révocables et irrévocables, trusts discrétionnaires ou fixes, influant sur l’impôt sur le revenu, les droits de succession et de donation, ainsi que sur les obligations de reporting. En Allemagne par exemple, les trusts étrangers sont considérés sous différents angles fiscaux : ils peuvent être traités comme transparents (transparence vis-à-vis du créateur ou des bénéficiaires) ou comme non transparents (personne fiscale propre). L’apport d’actifs à un trust peut être considéré comme une donation et assujetti à l’impôt sur les donations allemand, si le créateur ou les bénéficiaires sont résidents fiscaux au sens de la loi allemande sur les successions et donations. Les revenus courants du patrimoine détenu en trust sont généralement soumis à l’impôt sur le revenu, la question de l’imputation (aux bénéficiaires ou au trust lui-même) étant tranchée au regard du droit national et d’éventuelles conventions de double imposition. Il faut en outre respecter les obligations déclaratives de la loi sur le blanchiment d’argent (par exemple inscription au registre de transparence). S’agissant notamment des trusts à caractère non familial, les conséquences fiscales doivent être examinées en détail au cas par cas afin d’éviter toute imposition inattendue ou toute infraction fiscale.

Quel est le rôle et quels sont les droits du trustee dans un trust ?

Le trustee occupe une position centrale sur le plan juridique, car il détient et administre légalement le patrimoine du trust, mais agit exclusivement dans l’intérêt des bénéficiaires. Ses obligations résultent tant du document constitutif du trust (« Trust Deed ») que des prescriptions légales générales (par ex. devoirs de diligence fiduciaire, reddition de comptes, défense absolue des intérêts des bénéficiaires). En Allemagne, le trustee est considéré, lors de procédures internes, comme ayant la propriété réelle au sens de la loi sur le blanchiment d’argent, avec des obligations étendues en matière de documentation et d’information. Les trustees peuvent être des personnes physiques ou morales et sont le plus souvent soumis à un contrôle judiciaire ou administratif. En matière de gestion de patrimoine, ils disposent d’un certain pouvoir d’appréciation (discretion), selon ce qui est prévu dans le document constitutif. Les actes vis-à-vis des tiers sont toujours accomplis au nom du trustee, qui en assume donc la responsabilité principale, mais peut se retourner sur les actifs du trust. En cas de violation de leurs obligations (abus de biens sociaux, manquement au trust), les trustees sont personnellement responsables envers les bénéficiaires. Le régime de responsabilité peut toutefois faire l’objet d’aménagements dans le document constitutif du trust, dans les limites prévues par la loi.

Comment les trusts sont-ils reconnus et traités dans le droit allemand ?

Bien que le droit allemand ne connaisse pas de trust propre, les trusts constitués conformément à une législation étrangère peuvent être reconnus au titre du droit international privé. La Convention de La Haye sur le trust, entrée en vigueur en Allemagne le 1er juillet 2015, est déterminante. Elle régit notamment la reconnaissance juridique et les effets de telles structures concernant les patrimoines ayant un lien avec l’étranger. Cette reconnaissance n’emporte pas assimilation à un trust selon le droit allemand, mais permet de retranscrire les principaux effets selon le droit étranger, dans la mesure où ceci ne contrevient pas à l’ordre public allemand ou à des dispositions légales impératives. En pratique, il y a des difficultés, notamment s’agissant de la séparation des patrimoines, de l’inscription de biens immobiliers au registre foncier, de l’exécution des droits des créanciers ou de l’imputation fiscale – cette dernière étant habituellement fondée sur une approche économique, avec application de solutions de transparence. L’évaluation et la reconnaissance exactes varient selon la structure du trust concerné et les personnes impliquées (résidence, nationalité, siège du trust, etc.).

Quelles obligations de divulgation et de déclaration existent pour les trusts selon le droit allemand ?

Les trusts présentant un lien avec l’Allemagne sont soumis à de nombreuses obligations de divulgation et de déclaration, notamment en vertu de la Loi sur le blanchiment d’argent (GwG). Depuis la mise en œuvre de la 5ème directive européenne anti-blanchiment, les trustees détenant en Allemagne certains actifs (par exemple biens immobiliers ou parts sociales), ou considérés comme bénéficiaires effectifs au sens de l’article 3 GwG, sont tenus d’inscrire le trust et ses bénéficiaires effectifs au registre de transparence, et de fournir des informations sur demande aux autorités et à certains partenaires contractuels. Il peut aussi exister des obligations déclaratives fiscales (par exemple selon AO, ErbStG, EStG) lors des acquisitions, de l’utilisation des revenus et des distributions aux bénéficiaires. En cas de manquement à ces obligations, les contrevenants s’exposent à des amendes importantes, voire à une responsabilité pénale fiscale. Chaque cas doit faire l’objet d’une appréciation individuelle, en particulier selon la localisation du trust, le centre d’intérêts des bénéficiaires et du trustee et le lieu de situation des actifs.

Comment les bénéficiaires sont-ils protégés juridiquement et quels droits possèdent-ils ?

Les bénéficiaires d’un trust disposent en principe de droits subjectifs à l’encontre du trustee concernant la gestion conforme, la reddition de comptes, l’accès à l’information et, le cas échéant, le transfert d’actifs conformément aux conditions du trust. Ces droits sont généralement exécutoires devant les tribunaux, le droit à l’information et au contrôle à l’égard du trustee constituant le mécanisme de protection le plus important. Dans les pays de common law, les bénéficiaires détiennent un « equitable interest » sur le patrimoine du trust et peuvent en cas de manquement du trustee engager directement une action en justice (par exemple pour obtenir des dommages-intérêts, la révocation du trustee ou la restitution d’actifs). En Allemagne, les droits reposent généralement sur le contrat ou sur les principes généraux de la fiducie, qui prévoient notamment des obligations de loyauté, de diligence et de reddition de comptes. Toutefois, l’accès des bénéficiaires au patrimoine dépend toujours du contenu du trust deed (discretionary trust, fixed interest, etc.), ce qui peut également avoir des conséquences sur les droits des créanciers, l’insolvabilité et le droit de la famille.

Un citoyen résidant en Allemagne peut-il bénéficier d’un trust étranger sans payer d’impôts en Allemagne ?

En principe, les citoyens résidant en Allemagne sont soumis à une obligation fiscale illimitée, de sorte que l’ensemble des revenus mondiaux – et donc aussi les distributions ou la mise à disposition de revenus provenant de trusts étrangers – sont en principe imposables. L’imposition dépend du type de trust, du statut du bénéficiaire (settlor, trustee, bénéficiaire) ainsi que de la structure et du contrôle réels du trust. Souvent, le transfert d’actifs dans un trust entraîne déjà une obligation de payer des droits de donation, tandis que les distributions courantes (revenus, distributions de capital) peuvent être imposables au titre de l’impôt sur le revenu. Ce n’est que si le trust est reconnu par le droit fiscal allemand comme une fondation indépendante et intransparente, et qu’une double imposition par une convention fiscale bilatérale est exclue, qu’une exonération fiscale peut être envisagée dans des cas particuliers – ce qui reste cependant extrêmement rare dans la pratique. En outre, il existe d’importantes obligations de déclaration dont le non-respect est passible de sanctions pénales. Les tentatives de contourner l’impôt en Allemagne au moyen de montages de trusts étrangers font l’objet d’un contrôle et de poursuites par les autorités fiscales.