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Tranche

Définition et qualification juridique de la tranche

Une tranche désigne dans le contexte juridique et économique une partie d’un montant ou d’un volume global convenu, mise à disposition ou versée à un moment déterminé ou sous certaines conditions. Le terme provient du français et signifie « part » ou « section ». Les tranches sont principalement utilisées dans le cadre de financements, de valeurs mobilières, de crédits, d’obligations et de transactions, où elles constituent des unités juridiques indépendantes.

Tranche dans le cadre des contrats

Structure de base et accord sur les tranches

La répartition sous forme de tranches est notamment utilisée dans les financements de long terme, les crédits et les opérations sur les marchés de capitaux. Les parties conviennent dans le contrat de la façon dont le capital global est réparti en plusieurs tranches, des conditions d’octroi de chaque tranche ainsi que des conséquences juridiques associées à chaque mise à disposition. La structuration contractuelle des tranches est essentielle pour la gestion des risques, la planification de la liquidité et la sécurité juridique des parties impliquées.

Exemple : contrats de crédit

Dans les contrats de crédit, le montant total du prêt est souvent mis à disposition en plusieurs tranches. L’octroi d’une tranche supplémentaire peut être soumis à la réalisation de conditions telles que le respect de clauses contractuelles (« Covenants »), la présentation de justificatifs ou le respect de certains seuils.

Exemple : participations et investissements

Dans le domaine des participations ou du capital-risque, le financement est également souvent structuré sous forme de tranches. Les investisseurs versent le capital promis en plusieurs tranches, après que l’entreprise a atteint certains jalons.

Effets juridiques contraignants des accords de tranchage

La division du montant global en tranches engage juridiquement les parties dès l’entrée en vigueur du contrat sous-jacent. Chaque tranche possède ses propres modalités d’échéance, de paiement et de remboursement. La réalisation ou la non-réalisation des conditions spécifiques à une tranche peut avoir des effets importants sur l’ensemble de la relation contractuelle, notamment sur l’échéance des autres tranches, la responsabilité ou encore l’exercice de droits de rétractation.

Tranche en droit des marchés financiers et des valeurs mobilières

Tranche dans le cas des obligations et titres de créance

En droit des valeurs mobilières, les obligations ou autres titres de créance sont fréquemment émis en plusieurs tranches. Chaque tranche constitue une émission propre, pouvant différer en termes de volume, taux d’intérêt, durée, rang et autres conditions. Juridiquement, chaque tranche fait certes partie d’une obligation globale, mais elle est soumise à ses propres conditions spécifiques (« Terms and Conditions »).

Admission et obligation de prospectus

Chaque tranche peut nécessiter une admission distincte à la négociation ainsi qu’une obligation séparée de prospectus, à condition qu’elle diffère matériellement des précédentes. Les lois sur les marchés de capitaux, notamment le règlement européen sur les prospectus et les législations nationales sur les valeurs mobilières, fixent ces obligations.

Titrisation et tranchage

Lors de la titrisation de créances ou de droits (ex : Asset-Backed Securities, Mortgage-Backed Securities), les pools de créances sont répartis en différentes classes de risque. Ces classes de risque sont appelées tranches (« Senior Tranche », « Mezzanine Tranche », « Junior Tranche »). Chaque tranche est classée selon son rang de paiement et sa priorité en cas d’insolvabilité.

Différenciation du risque, de la responsabilité et du rang

Le cadre juridique attribue à chaque tranche des droits, obligations et positions différents. La tranche Senior bénéficie généralement d’une priorité sur les tranches subordonnées (« Subordination »). Ainsi, en particulier en cas d’insolvabilité, les produits doivent d’abord servir à satisfaire les créances de la tranche prioritaire.

Tranche en droit des sociétés et des entreprises

Tranche dans le cas des participations et augmentations de capital

En droit des sociétés, le capital d’une société peut être versé ou souscrit en plusieurs tranches. En cas d’augmentation de capital, les actions ou parts sociales sont souvent émises en plusieurs appels (« Drawdowns »), chaque tranche correspondant à un tour de souscription distinct.

Exigences juridiques pour la réalisation

Les règles de forme, de publicité et les prescriptions en matière d’augmentation de capital prévues par le droit des sociétés applicable (par ex. loi sur les sociétés anonymes, loi sur les SARL) imposent des exigences spécifiques pour chaque tranche et sa déclaration. La notification au registre du commerce et, le cas échéant, l’obligation d’information à l’autorité de surveillance sont impératives.

Tranche en droit fiscal et comptable

Comptabilisation et évaluation

Dans le cadre de la comptabilisation, les tranches sont à présenter comme des obligations ou des créances distinctes, sous réserve qu’elles soient soumises à des conditions juridiques ou des échéances différentes. Le traitement fiscal dépend de la structuration de chaque tranche, notamment en ce qui concerne le moment de réalisation des produits ou charges ainsi que d’éventuelles dépréciations.

Tranche en droit des sûretés et des procédures collectives

Structure de rangs et des sûretés

Dans le cadre d’une procédure d’insolvabilité, les tranches déterminent principalement l’ordre de priorité des créances. Les tranches prioritaires peuvent être garanties par des sûretés réelles (par ex. hypothèques, cautions), tandis que les tranches subordonnées ne sont prises en compte qu’en cas de satisfaction intégrale des créanciers prioritaires.

Impact sur l’égalité de traitement des créanciers

La répartition en tranches doit toujours respecter les principes d’égalité de traitement et de subordination en droit de l’insolvabilité. Toute subordination ou préférence illicite peut être contestée dans le cadre de la procédure collective.

Spécificités juridiques et distinctions

Distinction d’avec des concepts similaires

La tranche doit être clairement distinguée de notions telles que part de décaissement, paiement par tranche ou décaissement partiel, qui renvoient à différentes réalités juridiques et économiques. La tranche doit toujours être considérée comme une partie juridique distincte du montant global, pouvant donner lieu à ses propres conditions contractuelles, garanties ou obligations de prospectus.

Littérature et bases juridiques

Les principales normes régissant la structuration et le traitement des tranches figurent notamment dans les lois et règlements suivants :

  • Code civil allemand (BGB)
  • Loi sur le prospectus des valeurs mobilières (WpPG)
  • Code de gestion des placements collectifs (KAGB)
  • Loi sur les sociétés par actions (AktG) et loi sur les SARL (GmbHG)
  • Règlement sur l’insolvabilité (InsO)
  • Règlement prospectus européen

Une structure en tranches permet une grande flexibilité mais nécessite une structuration juridique rigoureuse, prenant en compte l’ensemble des exigences relatives au contenu contractuel, à la publicité, aux sûretés et à la protection des créanciers. Les conséquences juridiques de chaque tranche doivent être examinées individuellement, en tenant compte des dispositions légales applicables et du contenu exact du contrat.

Questions fréquentes

Comment une tranche est-elle juridiquement rattachée à un contrat-cadre de financement global ?

Dans le contexte juridique, une tranche est généralement définie comme une partie d’un cadre de financement global, comme pour les crédits, les émissions obligataires ou les investissements en capital-risque. Le rattachement d’une tranche est effectué en règle générale par des dispositions contractuelles qui subdivisent le contrat-cadre, comme un contrat de prêt, en montants partiels mobilisables ou versés sous certaines conditions. Les modalités de tranchage, notamment en ce qui concerne les conditions de paiement, de remboursement et les conditions spécifiques, sont définies de manière précise dans le contrat et, le cas échéant, dans des annexes ou side letters. Cela garantit que chaque tranche est juridiquement rattachée de manière claire au contrat de base. Pour plus de clarté, un tableau des tranches mentionnant les dates, montants et conditions de chaque paiement est souvent annexé.

Des conditions juridiques différentes peuvent-elles être convenues pour différentes tranches ?

Oui, il est courant et licite d’assortir différentes tranches d’un cadre de financement de conditions et de modalités spécifiques. Cela concerne notamment les taux d’intérêt, échéances, sûretés, covenants ou prérequis à la mise à disposition. Ces conditions reflètent souvent des profils de risque différents, les conditions du marché au moment de chaque tranche ou la progression du projet ou de l’entreprise financé(e). Juridiquement, cela se réalise par des clauses spécifiques dans le contrat ou des documents de tranche distincts. Une structuration transparente et cohérente est particulièrement importante pour éviter tout conflit d’interprétation et définir clairement les positions juridiques des deux parties.

Quelles conséquences juridiques entraîne le non-respect des conditions de mise à disposition d’une tranche ?

Si les conditions de paiement d’une tranche énoncées dans le contrat ne sont pas remplies par la partie bénéficiaire (par ex. l’emprunteur), le bailleur (par ex. la banque ou l’investisseur) a généralement le droit de refuser le décaissement. Ces conditions peuvent inclure la justification de jalons atteints, la présentation de certains documents ou l’atteinte d’indicateurs définis. Le non-respect peut également entraîner d’autres conséquences juridiques, telles que la résiliation (partielle) du contrat de financement global, la réclamation d’intérêts de retard ou des demandes de dommages et intérêts. Les effets juridiques exacts dépendent de la structuration contractuelle et doivent, en cas de doute, être évalués juridiquement au cas par cas.

Existe-t-il une obligation juridique de prendre toutes les tranches ?

Une obligation juridique de prendre l’ensemble des tranches convenues n’existe en principe pas automatiquement. Elle doit être expressément prévue au contrat. De nombreux contrats de financement comportent toutefois des clauses dites de « commitment », qui impliquent une obligation de souscrire toutes les tranches ou des souscriptions minimales (« Minimum Drawdown »). En l’absence d’une telle clause, l’emprunteur ou l’émetteur peut souvent renoncer à certaines tranches sans qu’aucune sanction ne s’applique de facto. Toutefois, les conséquences juridiques de ce renoncement (par ex. frais, perte de droits préférentiels, etc.) doivent également être prévues contractuellement pour éviter des litiges ultérieurs.

Comment la structuration par tranches est-elle régie juridiquement en cas de financement consortial ?

En cas de financement syndiqué impliquant plusieurs prêteurs ou investisseurs, la structuration par tranches est généralement prévue par un contrat de syndicat et d’autres accords complémentaires. Ceux-ci définissent les mécanismes de répartition, les processus de décision et les modalités de mise à disposition et de remboursement des différentes tranches. Il est essentiel de définir précisément comment les quotes-parts, flux de paiements et garanties sont alloués à chaque membre du syndicat. Des dispositions sur la gestion des opérations (par ex. missions du chef de file) et la mise en œuvre conjointe des droits relatifs à chaque tranche sont également prévues afin de limiter les risques juridiques et les conflits d’intérêts entre les parties.

Quelles particularités juridiques s’appliquent aux tranches dans les programmes d’aide publique ?

Dans le cadre des programmes d’aide publique – par exemple de l’UE, de la KfW ou des banques de développement régionales – le tranchage obéit généralement à des exigences spécifiques en matière de procédures d’attribution, d’aides d’État et de droit budgétaire. Cela implique notamment le respect strict des conditions de décaissement et des processus de contrôle, parfois sous surveillance externe de l’utilisation des fonds. La base juridique pour le paiement des tranches est généralement un arrêté d’octroi déterminant les conditions et périodes de mobilisation des fonds. Tout manquement à ces obligations peut entraîner des demandes de remboursement, la suspension de l’aide, voire des sanctions relevant du droit des subventions ou du droit budgétaire.

Comment la documentation et la preuve juridique du paiement des tranches sont-elles assurées ?

Le paiement de chaque tranche est confirmé juridiquement par des documents écrits, tels que des demandes de paiement (Disbursement Requests), des accusés de réception et, le cas échéant, des attestations de paiement. Ces documents font partie intégrante des documents contractuels et servent de preuve en cas de litige sur le respect ou non des obligations. En pratique, un relevé des flux de paiement mentionnant les dates, montants et bénéficiaires de chaque tranche est également généralement tenu. Surtout pour les financements à plusieurs étapes ou à long terme, une documentation exhaustive est juridiquement indispensable pour prouver l’exécution du contrat et d’éventuels droits ultérieurs devant les tribunaux.