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Témoins de Jéhovah

Statut juridique des Témoins de Jéhovah en Allemagne

Les Témoins de Jéhovah constituent une communauté religieuse d’inspiration chrétienne à l’organisation propre, présente dans le monde entier. En Allemagne, leur statut juridique revêt un intérêt particulier, notamment au regard du droit public, du droit des relations Église-État, du droit fiscal et du droit associatif. Les sections suivantes expliquent en détail les différents aspects juridiques concernant les Témoins de Jéhovah, en particulier leur statut de corporation de droit public, leurs droits et obligations, ainsi que les jugements et lois pertinents.


Corporation de droit public

Reconnaissance et statut

Les Témoins de Jéhovah ont été reconnus en Allemagne comme corporation de droit public (KdöR) le 24 juin 2006, après de longues procédures judiciaires et une évaluation par les autorités publiques. Ce statut est conféré conformément à l’Art. 140 de la Loi fondamentale (GG) conjugué à l’Art. 137 al. 5 de la Constitution de Weimar (WRV), dès lors qu’une communauté religieuse garantit, par sa constitution et son nombre de membres, la stabilité dans la durée.

En tant que corporation de droit public, la communauté de foi est autorisée à adopter ses propres statuts, réaliser des actes juridiques relevant du droit public, instituer des relations de fonctionnaires et percevoir des impôts (impôt religieux), bien que les Témoins de Jéhovah n’administrent traditionnellement pas d’impôt d’Église.

Obtention du statut

La reconnaissance intervient à l’échelle des Länder, chaque État fédéré procédant à l’examen de critères religieux, organisationnels et juridiques. La condition essentielle est la « garantie de durabilité » ainsi que la loyauté envers l’État de droit. La décision de la Cour constitutionnelle fédérale en date du 19 décembre 2000 (n° 2 BvR 1500/97) a ouvert la voie à une reconnaissance à l’échelle nationale. Près de 19 Länder ont désormais confirmé le statut de corporation de droit public des Témoins de Jéhovah.

Droits et obligations

Ce statut confère non seulement des privilèges, tels que l’utilisation d’entités propriétaires ecclésiastiques et l’exonération de certains impôts, mais comporte également des obligations. Par exemple, les Témoins de Jéhovah, comme d’autres communautés religieuses reconnues, sont soumis au contrôle de l’État pour la sécurité publique et l’ordre public, ainsi qu’à l’interdiction de toute discrimination, conformément à l’Art. 3 GG.


Aspects du droit constitutionnel religieux

Relations avec l’État

En vertu du principe de neutralité religieuse (voir art. 4 GG et art. 140 GG en lien avec l’art. 137 WRV), la République fédérale d’Allemagne traite de façon égale toutes les communautés religieuses. Les Témoins de Jéhovah sont donc soumis aux mêmes cadres juridiques que les autres confessions, ce qui s’applique tant à la protection de l’exercice religieux qu’à l’obligation de respecter l’ordre constitutionnel.

Droit à l’autodétermination et autonomie

En tant que corporation de droit public, les Témoins de Jéhovah bénéficient d’une vaste autonomie. Ils jouissent de l’autodétermination interne concernant l’organisation, les doctrines et la nomination aux postes de direction. Les interventions de l’État ne sont permises qu’exceptionnellement, par exemple en cas de violations graves de l’ordre public.

Cours de religion et accompagnement spirituel

Bien que les Témoins de Jéhovah aient, en principe, le droit de proposer un enseignement religieux confessionnel dans les écoles publiques (art. 7 al. 3 GG), ils n’exercent pas ce droit. Toutefois, ils ont le droit d’apporter un accompagnement spirituel dans les établissements pénitentiaires et les hôpitaux.


Contexte en droit des associations

Avant d’être reconnus comme corporation de droit public, les Témoins de Jéhovah étaient enregistrés en Allemagne en tant qu’association inscrite au registre (“Jehovas Zeugen in Deutschland e.V.”). Avec le nouveau statut, la base légale a changé, mais les droits et obligations issus du droit associatif existants ont été transférés à la structure de corporation. Leur organisation interne et les processus de décision définis par les statuts continuent d’être appliqués de manière autonome.


Traitement fiscal

But non lucratif

Les Témoins de Jéhovah, en tant que corporation de droit public, bénéficient d’avantages fiscaux conformément au § 5 al. 1 n° 9 KStG et au § 3 n° 6 GewStG. Leur caractère non lucratif est reconnu, car la communauté poursuit exclusivement et directement des objectifs religieux (§ 51 et suivants AO). Elle est donc exonérée de l’impôt sur les sociétés, de la taxe professionnelle et de la taxe foncière.

Taxe sur la valeur ajoutée

En règle générale, la communauté religieuse est exonérée de TVA, à condition de ne pas exploiter d’activités économiques au-delà des limites légales.

Dons et attestations de dons

Les dons versés aux Témoins de Jéhovah sont fiscalement déductibles en vertu du § 10b EStG, puisqu’ils sont reconnus d’utilité publique. La communauté est habilitée à délivrer les attestations de dons nécessaires.


Droits relevant du droit privé et autres aspects juridiques

Particularités du droit du travail

Les Témoins de Jéhovah peuvent pourvoir les postes et fonctions internes selon leurs propres directives (« protection des tendances » d’après § 118 al. 2 BetrVG). Ainsi, les relations de travail au sein de la communauté répondent à des règles spécifiques en matière de loyauté et d’adhésion à la foi.

Protection des données et droits de la personnalité

Comme pour toutes les communautés religieuses, la communauté est tenue, selon le RGPD et la BDSG, d’assurer la protection des données de ses membres. La collecte interne de données, telle que la tenue de listes de membres, est autorisée mais reste soumise aux exigences générales du droit de la protection des données.


Contentieux et jurisprudence de principe

La reconnaissance juridique des Témoins de Jéhovah a été marquée par de nombreuses procédures administratives et décisions de justice. Le jugement de la Cour constitutionnelle fédérale de 2000 (2 BvR 1500/97), notamment, a précisé le rapport entre la liberté de religion et les exigences du droit public des religions. D’autres contentieux portaient en partie sur la compréhension de la constitution par la communauté ainsi que sur la compatibilité de son organisation et de ses pratiques avec l’ordre démocratique libre. Les juridictions ont finalement confirmé que les Témoins de Jéhovah satisfont à ces exigences.


Perspective internationale

Le statut juridique des Témoins de Jéhovah varie considérablement à travers le monde. S’ils sont reconnus dans de nombreux États comme communauté religieuse et bénéficient de droits similaires à ceux accordés en Allemagne, certaines nations imposent encore des restrictions ou interdictions. Des instances internationales de défense des droits de l’homme, comme la Cour européenne des droits de l’Homme (CEDH), ont à plusieurs reprises renforcé les droits des Témoins de Jéhovah à la liberté religieuse.


Conclusion

Les Témoins de Jéhovah sont reconnus en Allemagne comme corporation de droit public et jouissent de tous les droits et obligations qui en découlent. Leur statut juridique est soutenu par de nombreuses décisions administratives et judiciaires et correspond largement à celui d’autres communautés religieuses reconnues. Outre des droits larges en matière d’autoadministration, de fiscalité et de pastorale, ils sont également soumis à des obligations juridiques de respect de l’ordre constitutionnel et de devoirs de protection envers les membres et les tiers. Ainsi, la situation juridique des Témoins de Jéhovah en Allemagne est exemplaire pour les relations entre l’État et les minorités religieuses au sein d’une société pluraliste.

Questions fréquemment posées

Les Témoins de Jéhovah doivent-ils effectuer le service militaire ou un service civil en Allemagne ?

Les Témoins de Jéhovah refusent, pour des raisons religieuses, le service militaire armé. En Allemagne, la Loi fondamentale prévoyait longtemps, en cas d’obligation de service militaire, que ces personnes puissent effectuer un service de remplacement (service civil). Dans plusieurs arrêts de principe, la Cour constitutionnelle fédérale a souligné la liberté religieuse (article 4 GG) et le droit à l’objection de conscience (article 4 alinéa 3 GG), de sorte que les Témoins de Jéhovah n’étaient pas dispensés des obligations de service, mais étaient exemptés du service militaire armé. Ils pouvaient, sur demande, être affectés au service civil. Depuis la suspension de la conscription en 2011, cette pratique n’est plus d’actualité, mais elle reste pertinente pour l’examen de la jurisprudence passée et pour d’éventuelles évolutions législatives futures.

Dans quelle mesure la communauté religieuse des Témoins de Jéhovah est-elle reconnue par l’État en Allemagne ?

La « Communauté religieuse des Témoins de Jéhovah en Allemagne, K.d.ö.R. » a été reconnue, à l’issue d’un long contentieux, en 2006 à Berlin puis à l’échelle nationale comme corporation de droit public (K.d.ö.R.). Selon le droit constitutionnel religieux allemand, il s’agit d’un statut qui est accordé à certaines communautés religieuses dès lors que leur organisation interne et le nombre de leurs membres garantissent la durabilité et qu’elles n’ont pas d’objectifs contraires à la Constitution. Ce statut implique notamment des privilèges tels que le droit de percevoir un impôt d’Église, d’employer des aumôniers dans des établissements publics et de gérer leurs propres écoles ou cimetières. Cette décision a également valeur de signal en matière d’égalité de traitement des communautés religieuses et fait référence comme jurisprudence importante en droit des religions.

Quelles règles juridiques s’appliquent aux Témoins de Jéhovah concernant la protection de l’enfance et la dénonciation des infractions ?

Les Témoins de Jéhovah, comme toutes les communautés religieuses en Allemagne, sont soumis au droit commun, notamment en matière de protection de l’enfance. Cela signifie qu’en cas de connaissance ou de soupçon fondé de mise en danger de l’enfant ou d’abus sexuel, les dispositions légales, et en particulier la loi fédérale sur la protection de l’enfance, s’appliquent. Les Témoins de Jéhovah sont tenus d’alerter les autorités dès qu’une situation de danger est manifeste, même si des obligations de confidentialité religieuse ou des règles internes existent. Les responsables de la communauté (par ex. anciens), informés d’une infraction, disposent comme les ministres d’autres communautés religieuses d’un droit limité de refus de témoigner selon le § 53 StPO, ce qui ne conduit pas à une exonération totale de l’obligation de signalement. La jurisprudence actuelle souligne que la mission de protection de l’État prévaut sur les règles internes.

Les Témoins de Jéhovah disposent-ils de droits particuliers au travail, par exemple sur le lieu de travail ?

En droit du travail allemand, les Témoins de Jéhovah ne bénéficient pas d’un statut particulier, mais sont protégés contre les discriminations fondées sur leur conviction ou leur religion par la Loi générale sur l’égalité de traitement (AGG). Cela concerne notamment l’embauche, le licenciement ainsi que les prestations sociales et d’entreprise. Les employeurs sont tenus de prendre en considération la pratique religieuse, dans la mesure où cela ne nuit pas considérablement au fonctionnement de l’entreprise. Par exemple, l’octroi d’un congé non payé pour des événements religieux ou l’exemption de certaines obligations (comme les fêtes d’anniversaire ou l’hymne national), si incompatibles avec leur foi. Ces cas requièrent toujours un examen au cas par cas et une mise en balance avec les intérêts de l’entreprise.

Existe-t-il des restrictions médicales liées à la foi des Témoins de Jéhovah et quelle est la situation juridique ?

Les Témoins de Jéhovah refusent catégoriquement, pour des raisons religieuses, les transfusions sanguines. Le droit allemand respecte l’autonomie du patient, même si la décision médicale peut être vitale. Les membres adultes des Témoins de Jéhovah peuvent déposer des directives anticipées ; les médecins sont tenus de les respecter, tant que le patient est apte à consentir. S’agissant des enfants mineurs, c’est l’intérêt supérieur de l’enfant qui prime : médecins et tribunaux peuvent – au besoin contre la volonté des parents – ordonner une transfusion sanguine si celle-ci est médicalement nécessaire et vitale. Dans de tels cas, la protection de l’enfant par l’État prime sur les droits religieux parentaux.

Le prosélytisme des Témoins de Jéhovah est-il réglementé juridiquement ?

Le travail missionnaire actif, tel que le porte-à-porte ou les stands sur la voie publique, est en principe protégé en Allemagne par la liberté religieuse et la liberté d’expression. Toutefois, les Témoins de Jéhovah doivent respecter les règles relatives à la protection des données, en particulier depuis l’entrée en vigueur du RGPD, et ne sont pas autorisés à collecter des données personnelles sans consentement. Ils doivent également respecter le droit de propriété privée ; en cas d’interdiction sur un terrain privé, ils doivent respecter l’interdiction d’accès. Le harcèlement non autorisé ou l’ignorance d’un panneau « Pas de publicité » peut être qualifié d’infraction administrative ou d’atteinte à la propriété privée.

Les Témoins de Jéhovah ont-ils le droit de gérer leurs propres cimetières ?

Grâce à leur statut de corporation de droit public, les Témoins de Jéhovah ont en Allemagne le droit d’établir et d’exploiter leurs propres cimetières. Sur ce point, ils ont les mêmes droits que d’autres communautés religieuses établies. L’ouverture de cimetières est soumise aux lois fédérales et régionales sur les funérailles, notamment en ce qui concerne le droit de la construction, la réglementation environnementale et sanitaire. L’accès à ces cimetières peut être réservé aux membres de la communauté, et il n’y a aucune obligation d’enterrer des personnes extérieures. À l’intérieur du cimetière, les règles internes des Témoins de Jéhovah s’appliquent dans le respect de la législation en vigueur.