Notion et signification de l’extraction de remplacement
L’extraction de remplacement (« Ersatzaussonderung ») est une notion du droit allemand de l’exécution forcée et du droit des procédures collectives (insolvabilité). Elle désigne le droit pour une personne, lors d’une procédure d’insolvabilité ou d’une exécution individuelle, d’exiger la restitution d’un bien ou d’une valeur patrimoniale de la masse d’insolvabilité ou de la saisie, lorsqu’au lieu du bien initialement détenu susceptible d’être extrait, celui-ci n’existe plus physiquement mais qu’un substitut (objet de remplacement) est disponible. L’extraction de remplacement complète ainsi le droit d’extraction initial et renforce la protection des droits réels dans des situations où la chose d’origine a disparu ou a été vendue.
Fondements juridiques de l’extraction de remplacement
Réglementations légales
Le droit à l’extraction de remplacement est fondé sur de nombreuses dispositions du Code civil allemand (BGB) et de la Loi sur l’insolvabilité (InsO). L’article 47 InsO est déterminant, selon lequel les droits d’extraction peuvent également être exercés sur les substituts, à condition qu’ils aient pris la place du bien initial susceptible d’extraction. On trouve également des références dans le droit de l’exécution forcée, en particulier dans les cas où le débiteur n’est plus en possession du bien initial devant être restitué.
Droit d’extraction et extraction de remplacement
Le droit d’extraction traite du droit de revendication d’un tiers non débiteur sur un bien contenu dans la masse d’insolvabilité et qui lui appartient. Si toutefois le bien initial n’existe plus, suite à une cession, destruction ou transformation, la question se pose de savoir s’il existe un droit à la restitution du substitut reçu (par exemple une somme d’argent) et dans quelle mesure. C’est précisément dans de tels cas qu’intervient l’extraction de remplacement.
Conditions de l’extraction de remplacement
1. Existence d’un droit d’extraction
Il faut disposer d’un droit d’extraction d’origine sur un bien déterminé, tel qu’une clause de réserve de propriété, un droit de gage ou un droit de sûreté. Ce droit doit exister au moment de l’ouverture de la procédure d’insolvabilité.
2. Disparition ou perte de l’objet initial d’extraction
L’objet initial à extraire ne doit plus être en possession du débiteur mais a été remplacé par un substitut. Cela se produit, par exemple, en cas de vente, transformation ou destruction de l’objet, et par l’acquisition en échange d’une autre valeur (par exemple argent, indemnité d’assurance, dommages-intérêts).
3. Subrogation : le substitut doit être identifiable
La reconnaissance d’un droit à l’extraction de remplacement dépend principalement de la preuve que le substitut a concrètement et spécifiquement pris la place de l’objet initial destiné à l’extraction. Cela présuppose, en règle générale, la « subrogation » (remplacement), telle qu’elle se présente lors de la perception du prix de vente ou du versement d’une indemnité d’assurance.
4. Absence d’acquisition de propriété de bonne foi par un tiers
Le droit à l’extraction de remplacement n’existe en principe pas si un tiers a acquis de bonne foi la propriété du substitut ou s’est vu conférer un autre droit protégé. Il s’agit ainsi d’éviter une contrainte excessive sur le commerce juridique.
Distinction par rapport à d’autres notions juridiques
Distinction avec la séparation de remplacement
L’extraction de remplacement doit être distinguée de la séparation de remplacement. Tandis que l’extraction de remplacement vise la restitution d’un substitut au bénéficiaire initial du droit d’extraction, la séparation de remplacement (par exemple, §§ 49, 170, 171 InsO) concerne la préférence de certains créanciers de la masse dans la procédure d’insolvabilité en ce qui concerne des biens spécifiquement réalisés.
Distinction avec l’extraction simple
Dans le cadre d’une extraction simple, la restitution du bien appartenant au bénéficiaire du droit d’extraction est demandée. L’extraction de remplacement ne s’applique qu’en cas d’extension de la situation, notamment lorsque le bien initial n’existe plus.
Exemples pratiques d’application
Réserve de propriété et cession
Si un débiteur revend un bien livré sous réserve de propriété avant la faillite et que le prix d’achat n’a pas encore été réglé au débiteur, le fournisseur peut, à l’ouverture de la procédure d’insolvabilité, réclamer l’extraction de remplacement de la créance du prix d’achat ou des sommes encaissées, à condition qu’elles aient été clairement séparées sur un compte distinct.
Indemnité d’assurance après destruction
Si un bien détenu pour un tiers est détruit et que l’administrateur de l’insolvabilité perçoit une indemnité d’assurance, le créancier dispose d’un droit à l’extraction de remplacement sur cette prestation, pour autant que le paiement puisse être affecté de façon concrète et certaine.
Droit au remboursement issu d’une transaction échouée
Si une mutation de propriété non réalisée donne lieu à un droit au remboursement ou à une autre prestation de remplacement de la part d’un tiers, l’extraction de remplacement peut également être revendiquée sur celle-ci, à condition que le droit au remboursement soit incorporé à l’actif de la masse d’insolvabilité.
Limites et exclusions de l’extraction de remplacement
Mélange avec d’autres actifs
Si le substitut est, par exemple, une somme d’argent qui a été versée dans le patrimoine général ou sur le compte global de la masse (‘Massesammelkonto’) du débiteur en faillite et mélangée à d’autres fonds, l’extraction de remplacement peut être exclue. Il est toujours nécessaire que l’identification soit claire – une « individualisation du compte » (par exemple un compte séquestre) est requise.
Protection de la masse d’insolvabilité et égalité des créanciers
Les droits de l’ensemble des créanciers de la faillite ne doivent pas être indûment compromis par l’extraction de remplacement. Ainsi, la jurisprudence impose des critères stricts en matière de preuve et d’attribution du substitut.
Conséquences juridiques de l’extraction de remplacement
Lorsqu’un droit à l’extraction de remplacement a été valablement exercé, l’objet substitut, tout comme l’objet initial, est exclu de la masse d’insolvabilité. L’administrateur doit restituer le substitut. Cela renforce la position juridique du propriétaire initial ou du titulaire du droit.
Signification en droit de l’exécution forcée
L’extraction de remplacement a également une importance dans le cadre de l’exécution forcée individuelle. Par exemple, si un bien saisi est réalisé et que le produit de la vente n’a pas encore été remis au créancier, le droit à restitution sur le produit de la vente peut être exercé par analogie, à condition qu’un droit d’extraction existait sur le bien initialement saisi.
Littérature et jurisprudence
L’extraction de remplacement fait l’objet d’une littérature abondante et d’une jurisprudence de la Cour fédérale de justice. Elle est traitée de manière exhaustive dans les commentaires de droit civil, les ouvrages spécialisés en droit des faillites et les contributions relatives à la séparation de comptes et à l’égalité des créanciers.
Résumé
L’extraction de remplacement constitue un instrument essentiel pour la protection des droits réels en cas d’insolvabilité et d’exécution forcée. Elle accorde le droit d’exiger de la masse d’insolvabilité les substituts ayant pris la place de biens à extraire livrés ou disparus, pourvu qu’ils soient individualisables et attribuables. De ce fait, l’extraction de remplacement contribue de manière décisive à la protection des créanciers et à l’égalité de traitement dans le droit des faillites.
Questions fréquentes
Quelles conditions juridiques doivent être réunies pour l’extraction de remplacement ?
Les conditions juridiques applicables à l’extraction de remplacement résultent principalement des dispositions des §§ 47, 48 InsO. D’abord, le titulaire du droit d’extraction doit, dans le cadre de la procédure d’insolvabilité, disposer d’un droit à la restitution d’un bien ou d’un droit sur un objet déterminé, qui ne figure cependant plus dans la masse en raison, par exemple, d’une vente, destruction ou transformation préalable à l’insolvabilité. À la place se trouve dans la masse une créance ou un substitut ayant remplacé la chose d’origine (dite subrogation). Il est nécessaire que ce substitut présente un lien incontestable avec le bien initial, c’est-à-dire qu’il existe une relation matérielle ou juridique directe. À titre d’exemple, il ne suffit pas que le produit provienne simplement de l’activité courante du débiteur ; il faut au contraire que le lien identitaire entre le substitut et le bien de départ soit juridiquement et économiquement identifiable et différenciable. Enfin, il convient de souligner que les droits à l’extraction de remplacement sont en principe privilégiés par le droit des procédures collectives, si bien que l’administrateur doit remettre le bien, dès lors que toutes les conditions sont réunies.
Comment l’extraction de remplacement se distingue-t-elle de la restitution de remplacement ?
L’extraction de remplacement diffère essentiellement de la restitution de remplacement par la qualité juridique du droit du bénéficiaire. Alors que, dans l’extraction de remplacement, un droit réel sur le substitut est revendiqué et que celui-ci doit être exclu de la masse, la restitution de remplacement constitue en principe une simple créance personnelle du créancier contre l’administrateur, par exemple aux fins de restitution du produit de cession, si celui-ci n’a pas encore été mélangé à l’actif de la masse. En cas de restitution de remplacement, le créancier dépend du fait que ce produit reste identifiable comme actif distinct ; sinon il peut perdre son privilège et ne pourra faire valoir qu’une créance sur la masse. L’extraction de remplacement opère plus vigoureusement, puisque le bénéficiaire dispose du droit d’extraction sur le substitut précisément, et ce, indépendamment d’une conservation séparée, à condition que le lien avec le droit initial soit établi.
L’extraction de remplacement est-elle également possible pour de l’argent liquide et des créances monétaires ?
L’extraction de remplacement portant sur des espèces ou des créances monétaires est en principe possible, mais soumise à des conditions strictes. Pour l’argent liquide, il faut que le produit ait été clairement séparé des autres avoirs du débiteur, par exemple par un compte séparé ou un dépôt signalé comme tel. Dès lors que la somme – par exemple après dépôt sur un compte courant du débiteur – est mélangée de façon indivisible à la masse d’insolvabilité, la possibilité d’extraction de remplacement disparaît en principe et le bénéficiaire perdra son privilège ; il ne disposera alors que d’une créance sur la masse (§ 38 InsO). Dans le cas de créances monétaires, l’extraction de remplacement n’est possible que si un droit réel pèse sur la créance, comme par la constitution d’un gage sur la créance ou une cession à titre de sûreté en faveur du bénéficiaire. En pratique, cela s’avère cependant souvent difficile, le lien entre le produit et le droit initial sur la créance étant souvent impossible à retracer.
Quels objets ou quels droits peuvent faire l’objet d’une extraction de remplacement ?
Dans le cadre de l’extraction de remplacement, tous les objets et droits peuvent être en principe revendiqués, dès lors qu’ils ont remplacé l’objet initial à extraire et que le titulaire dispose d’un droit réel à leur égard. Il peut s’agir par exemple du prix de vente d’un bien livré sous réserve de propriété, d’une indemnité après destruction du bien ou encore de droits de substitution comme une hypothèque. Tout dépend de la possibilité de démontrer clairement et juridiquement la subrogation, c’est-à-dire que le substitut doit être incontestablement attribuable au droit d’extraction initial. Si les substituts sont mélangés, transformés ou à nouveau cédés, la possibilité de l’extraction de remplacement dépend de la traçabilité pour des tiers des modalités et de l’affectation de la subrogation.
Quels sont les effets d’une extraction de remplacement sur la masse d’insolvabilité et les autres créanciers ?
L’extraction de remplacement a pour effet que le substitut concerné ne tombe pas dans la masse disponible pour le paiement des créanciers, mais doit prioritairement être restitué au bénéficiaire d’extraction. Cela peut, dans certains cas, réduire significativement la masse, car des substituts de valeur (tels que des indemnités d’assurance ou recettes de vente d’actifs) provenant de la réalisation de certains biens ne sont pas disponibles pour la satisfaction générale des créanciers. Les droits et intérêts des autres créanciers se trouvent donc limités, dans la mesure où leurs chances de paiement sur la masse sont diminuées. Toutefois, l’extraction de remplacement n’est accordée que si les conditions légales et la subrogation peuvent être prouvées ; autrement, les créances de remplacement réintègrent le patrimoine général du débiteur et bénéficient à tous les créanciers dans la procédure d’insolvabilité.
Quelle est l’importance de l’extraction de remplacement dans le cas de la réserve de propriété prolongée ?
En cas de réserve de propriété prolongée, l’extraction de remplacement revêt une importance pratique particulière, la marchandise initialement livrée sous réserve étant fréquemment revendue par le débiteur. Du fait de la réserve prolongée, les créances contre l’acquéreur final sont en général transférées au vendeur initial par cession de créances. Le fournisseur conserve ainsi la possibilité d’extraire, à la place du bien livré, le prix de revente ou la créance en résultant. Il importe que cette cession soit valable et que le produit soit clairement identifié comme relevant du droit d’extraction. Dans de telles situations, l’extraction de remplacement est l’instrument central de protection des droits du fournisseur dans la procédure de faillite.
Quelles particularités procédurales s’appliquent aux actions d’extraction de remplacement ?
Sur le plan procédural, le droit à l’extraction de remplacement est en règle générale invoqué au moyen d’une action en extraction (§ 85 InsO) contre l’administrateur judiciaire. Le bénéficiaire du droit d’extraction supporte la charge de l’allégation et de la preuve tant pour le droit d’extraction initial que pour l’existence de la subrogation. L’administrateur peut opposer des moyens de défense à la demande, notamment l’impossibilité de reconstituer le lien avec le droit initial ou l’affectation définitive du substitut à la masse. Jusqu’à décision définitive, l’administrateur est en principe empêché de verser le substitut à la masse ou de l’utiliser à d’autres fins. En cas d’urgence, il est recommandé d’obtenir une mesure conservatoire afin d’éviter une perte irrémédiable du droit à l’extraction de remplacement.