Notion et principes fondamentaux du restructuring
La notion de restructuring (en allemand « Restrukturierung ») désigne en droit l’ensemble des mesures visant à la refonte fondamentale des structures juridiques, économiques et organisationnelles d’une entreprise, d’un groupe de sociétés ou d’un conglomérat. L’objectif principal du restructuring est d’améliorer durablement la situation économique et d’assurer la poursuite de l’activité, en particulier en période de crise. Les principaux domaines du restructuring comprennent les mesures financières, opérationnelles et en droit des sociétés, qui sont souvent interdépendantes et soumises à des cadres juridiques complexes.
Cadre juridique du restructuring
Aspects de droit des sociétés
Au cœur de nombreux processus de restructuration figurent des mesures relevant du droit des sociétés. Celles-ci comprennent notamment :
Transformation et fusion
Une restructuration peut être réalisée par des opérations de transformation juridique telles que la fusion, la scission, la transformation de la forme juridique ou le transfert d’actifs. À cet égard, la loi sur la transformation des sociétés (UmwG) ainsi que les dispositions pertinentes du Code de commerce (HGB) et du Code civil (BGB) s’appliquent. Ces mesures servent à adapter les structures d’entreprise, par exemple pour fusionner des filiales ou séparer des branches d’activité déficitaires.
Mesures sur le capital
Les réductions ou augmentations de capital, y compris l’apport de nouveaux fonds par les associés ou des investisseurs extérieurs, sont des instruments courants dans le cadre d’une restructuration. Sur le plan du droit des sociétés, il convient de respecter les exigences formelles relatives aux résolutions, aux mesures sur le capital et aux inscriptions au registre du commerce.
Modification de la gouvernance d’entreprise
Des modifications statutaires, notamment en ce qui concerne la structure de direction, les règles de représentation ou la répartition des droits de vote entre associés, peuvent devenir nécessaires. Cela concerne aussi bien la GmbH, la SA que les sociétés de personnes et, selon la mesure en question, requiert des majorités qualifiées et des actes notariés.
Questions de droit de l’insolvabilité
Les restructurations sont souvent d’actualité lorsqu’une crise financière menace ou s’est déjà manifestée. Les règles applicables figurent en particulier dans la Loi sur l’insolvabilité (InsO).
Restructuration préventive avant l’insolvabilité
Depuis le début de l’année 2021, la loi sur le cadre de stabilisation et de restructuration des entreprises (StaRUG) permet aux entreprises de procéder à une restructuration préventive, c’est-à-dire avant l’ouverture d’une procédure d’insolvabilité. Le StaRUG offre la possibilité d’organiser les engagements en dehors d’une procédure d’insolvabilité via des plans de restructuration, de prendre en compte les intérêts des créanciers et d’éviter un état de cessation de paiements. Cela englobe des mesures telles que la réduction de dette, l’étalement des paiements ou le rang inférieur des créances.
Restructuration en situation proche ou dans l’insolvabilité
En procédure d’insolvabilité, le plan d’insolvabilité (§§ 217 et suivants InsO) et la gestion autonome (§§ 270 et suivants InsO) constituent des instruments juridiques essentiels pour la restructuration. L’objectif est de permettre, sous contrôle judiciaire, une restructuration globale avec l’accord des créanciers et la validation du tribunal. Dans le cadre de la gestion autonome, la direction reste habilitée à agir, ce qui peut faciliter la poursuite et la restructuration de l’activité.
Implications en droit du travail
Les mesures de restructuration ont souvent une incidence significative sur les relations de travail existantes et les droits collectifs des salariés.
Modification de l’organisation et plan social
Une exigence juridique essentielle est la loi sur la constitution des entreprises (BetrVG). Les restructurations qui impliquent des modifications fondamentales de l’entreprise au sens de l’article 111 du BetrVG — telles que fermeture, délocalisation ou profondes changements de l’organisation — déclenchent d’importants droits de codécision et de participation du comité d’entreprise. Généralement, il convient de négocier un accord d’intérêts et un plan social afin d’atténuer les désavantages économiques pour les salariés concernés.
Protection contre le licenciement et licenciements collectifs
Si la restructuration entraîne des licenciements pour raisons économiques, il convient de respecter la loi sur la protection contre le licenciement (KSchG) et la directive européenne sur les licenciements collectifs. Des obligations de déclaration auprès de l’agence pour l’emploi ainsi que le respect de délais minimaux s’imposent impérativement.
Conséquences fiscales
Chaque restructuration doit faire l’objet d’un examen approfondi quant à ses conséquences fiscales. Les questions pertinentes concernent entre autres :
- Le traitement fiscal des opérations de transformation selon la loi sur la fiscalité des transformations (UmwStG)
- La prise en compte des profits de restructuration conformément à l’article 3a EStG
- Les éventuelles conséquences en matière de TVA lors des transferts d’actifs
- L’incidence sur les reports de pertes au sens de l’article 8c KStG et de l’article 10a GewStG
Une restructuration fiscalement neutre exige le respect minutieux de réglementations complexes et, le cas échéant, la demande d’avis contraignants auprès des autorités fiscales compétentes.
Autres cadres juridiques
Contrats de crédit et documentation financière
Les restructurations impliquent généralement des interventions dans les contrats de financement existants. Les clauses dites « covenants », les dispositions relatives au changement de contrôle ou les droits de résiliation anticipée peuvent nécessiter des adaptations. Les accords de modification ou les renégociations avec les créanciers doivent être juridiquement sécurisés.
Droit de la concurrence et du contrôle des concentrations
En particulier lors des restructurations au sein d’un groupe ou lors de fusions, le droit de la concurrence doit être pris en compte. Les obligations de notification auprès de l’autorité allemande de la concurrence ou des autorités européennes (§§ 35 et suivants GWB, art. 4 et suivants du règlement communautaire sur les concentrations) peuvent retarder ou empêcher la mise en œuvre de restructurations.
Autorisations administratives
Il convient également d’examiner si de nouvelles autorisations, licences ou concessions doivent être sollicitées pour les entités restructurées, par exemple lors de transformations dans des secteurs régulés, tels que la finance ou l’énergie.
Déroulement d’un processus de restructuration juridiquement sécurisé
Analyse et planification
La première étape consiste généralement en une analyse de la situation économique, fiscale et juridique de départ. Sur cette base, une stratégie globale de restructuration est développée en tenant compte des objectifs des propriétaires de l’entreprise ainsi que des intérêts des parties prenantes concernées.
Mise en œuvre des mesures
La mise en œuvre opérationnelle de la restructuration nécessite le respect de toutes les exigences légales formelles et matérielles. Selon la stratégie choisie, l’accent porte sur la mise en place de modifications juridiques, la négociation avec les créanciers, la conclusion d’accords de restructuration et, si nécessaire, l’accompagnement judiciaire dans le cadre des procédures StaRUG ou d’insolvabilité.
Documentation et processus de contrôle
Une documentation complète de toutes les étapes, décisions et contrats est indispensable. De plus, le suivi permanent des mesures, y compris le respect des éventuels délais, obligations de déclaration et de reporting, doit être garanti.
Risques et protection juridique
Les mesures de restructuration comportent de nombreux risques juridiques. Les contestations par les créanciers ou les associés, les risques de responsabilité pour les organes de direction (notamment en cas de retard dans la déclaration de l’état de cessation de paiements, art. 15a InsO) ainsi que les risques fiscaux doivent être pris en compte. En outre, les comités d’entreprise et les salariés peuvent rechercher une protection juridique devant les tribunaux du travail.
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Résumé
La notion de restructuring englobe un catalogue complexe de mesures juridiques, économiques et organisationnelles visant à la restructuration et au redressement des entreprises. Les exigences juridiques résultent de nombreuses lois, telles que le droit des sociétés, le droit de l’insolvabilité, le droit du travail, le droit fiscal ainsi que d’autres domaines spécifiques du droit. Une restructuration réussie et juridiquement sûre exige une planification minutieuse, une coordination interdisciplinaire et le respect de l’ensemble des cadres juridiques afin de mener la restructuration de manière durable et conforme aux intérêts de toutes les parties prenantes.
Foire aux questions
Quelles sont les conditions juridiques pour l’ouverture d’une procédure de restructuration ?
Pour ouvrir une procédure de restructuration selon le droit allemand — que ce soit dans le cadre du dispositif préventif de StaRUG (loi sur la stabilisation et la restructuration des entreprises) ou dans celui de la loi sur l’insolvabilité (InsO) — des conditions juridiques précises doivent être réunies. D’abord, il doit exister une menace de cessation de paiements de l’entreprise (§ 18 InsO) ; une cessation de paiements déjà effective ou une situation de surendettement exclut la procédure StaRUG et conduit généralement à l’obligation de déposer une demande d’insolvabilité (§ 15a InsO). En outre, le débiteur doit agir de manière autonome et active : seule l’entreprise elle-même peut déposer une demande de restructuration. L’ouverture de la procédure suppose par ailleurs que le plan de restructuration soit présenté de façon cohérente, que l’ensemble des groupes de créanciers concernés soient informés à temps et en détail, et qu’aucun abus manifeste de droit ne soit constaté. L’accord d’une majorité qualifiée des groupes de créanciers (au moins 75 %) est en principe nécessaire. Enfin, toutes les obligations de publicité, de déclaration et d’information vis-à-vis du tribunal de restructuration et éventuellement du public doivent être respectées.
Dans quelle mesure les contrats de travail sont-ils protégés ou affectés par une procédure de restructuration ?
Les contrats de travail restent en principe valides pendant une procédure de restructuration et relèvent de la protection générale contre le licenciement en vertu de la loi sur la protection contre le licenciement (KSchG). Toutefois, la restructuration permet, en cas de réorganisation de l’entreprise, des mesures d’ajustement au niveau du droit du travail, telles que des transferts d’entreprise au sens de l’article 613a BGB ou des négociations de plans sociaux avec le comité d’entreprise. Dans la procédure StaRUG, il n’existe pas de possibilité de modification ou de résolution unilatérale des contrats de travail par le biais du plan de restructuration — il demeure nécessaire de recourir aux instruments du droit du travail, tels que les licenciements avec modification du contrat. En procédure d’insolvabilité, en revanche, les délais de préavis sont simplifiés (§ 113 InsO), et les dettes de masse liées à la poursuite des contrats de travail doivent être honorées. Les arriérés de salaire antérieurs à la procédure ne sont couverts qu’à hauteur du dividende d’insolvabilité, tandis que les créances relatives au salaire d’insolvabilité sont garanties par l’agence pour l’emploi.
Quel est le statut juridique des créanciers dans une procédure de restructuration ?
Les créanciers jouent un rôle central dans la procédure de restructuration. Chaque catégorie de créances doit être classifiée selon des critères juridiques ; différentes catégories de créanciers bénéficient de droits de participation distincts (§ 9 StaRUG). Les créanciers sont informés des mesures envisagées, peuvent présenter des propositions ou des objections, et participent au vote sur le plan de restructuration. Pour l’adoption du plan, une majorité qualifiée de chaque groupe est requise ; des mécanismes de protection des minorités s’appliquent si certains groupes ne l’approuvent pas. Par ailleurs, les créanciers disposent de droits de recours, notamment pour vérifier le respect de l’égalité de traitement ou contester la validation du plan en cas d’erreur formelle ou matérielle. Dans le cadre du StaRUG, l’exercice individuel des créances est limité pendant la durée de la procédure, afin de favoriser une solution collective ordonnée.
Qu’advient-il des contrats en cours et des relations contractuelles continues lors d’une procédure de restructuration ?
Les contrats existants, ainsi que les relations contractuelles continues, constituent un élément central du processus de restructuration. Dans le cadre du StaRUG, le débiteur peut, sous certaines conditions, demander l’adaptation de contrats essentiels ou — avec l’accord des parties concernées ou sur décision judiciaire — leur résiliation. Le StaRUG n’autorise cependant pas la résiliation unilatérale, sauf si celle-ci est prévue contractuellement. En matière d’insolvabilité, l’article 103 InsO consacre le « droit d’option » : l’administrateur judiciaire décide de l’exécution ou de la continuation du contrat. Les relations contractuelles continues obéissent à des délais de résiliation spécifiques, souvent plus courts (§ 109 InsO). Les clauses prévoyant un droit de résiliation spécial en cas de restructuration ou d’insolvabilité sont souvent invalides (« inopposability clauses », § 119 InsO).
Quel rôle joue le tribunal de restructuration et quel est l’exercice de son contrôle pendant la procédure ?
Le tribunal de restructuration est une section spécialisée en droit des affaires du tribunal d’instance, qui occupe une fonction centrale de surveillance et de gestion pendant la procédure de restructuration. Il vérifie la recevabilité et la régularité formelle des demandes de restructuration, mandate le cas échéant un commissaire à la restructuration (§ 73 StaRUG), et veille au respect des règles légales relatives au plan, y compris l’information des créanciers, la documentation et le processus de vote. En cas de besoin, le tribunal décide de mesures de protection telles que la suspension des poursuites (§ 49 StaRUG) ou de la validation du plan de restructuration. Il traite également les plaintes et recours et rend des décisions contraignantes dans les litiges de procédure. Par ses pouvoirs de contrôle et de décision, il garantit le bon déroulement légal, ordonné et transparent de la procédure pour toutes les parties.
Quels sont les risques de responsabilité pour les dirigeants durant et après une restructuration ?
Les dirigeants encourent d’importants risques de responsabilité pendant et après une restructuration. Ils doivent notamment déclarer sans délai — en principe sous trois semaines — la survenance des causes d’insolvabilité (§ 15a InsO). Le manquement à cette obligation de déclaration peut entraîner des conséquences civiles et pénales, dont la responsabilité personnelle pour dommages-intérêts et des sanctions pénales (retard fautif, dissimulation d’insolvabilité). De plus, les dirigeants répondent d’éventuels manquements à leurs obligations de diligence en vertu de l’article 43 GmbHG ou de l’article 93 AktG, touchant notamment les paiements effectués après la survenance de l’insolvabilité (§ 64 GmbHG ancien, désormais § 15b InsO). En procédure de restructuration selon StaRUG, les dirigeants sont également soumis à de larges devoirs d’information, de coopération et de documentation, dont la violation peut fonder des actions en responsabilité lorsqu’un comportement fautif cause un préjudice aux créanciers ou favorise indûment les intérêts d’associés.
Quelles particularités juridiques s’appliquent aux restructurations internes au groupe ?
Lors de restructurations de groupes d’entreprises, des exigences juridiques particulières s’appliquent en ce qui concerne le traitement en droit des groupes et en droit de l’insolvabilité. Il convient d’abord de distinguer si les sociétés concernées sont juridiquement indépendantes ou simplement liées économiquement. Les sociétés du groupe juridiquement autonomes restent en principe soumises à des procédures de restructuration ou d’insolvabilité distinctes, les interactions devant toutefois être réglementées de manière spécifique par le biais de contrats intra-groupe, de prêts et de garanties. Les plans de restructuration doivent être coordonnés à l’échelle du groupe, ce qui est assuré par l’intégration des groupes de créanciers liés au groupe et la divulgation des dépendances intra-groupe (§ 30 StaRUG). Il existe également une interdiction des désavantages liés aux transactions (« financements de groupe préjudiciables ») pour les sociétés individuelles au détriment des intérêts des créanciers (activation de garanties, compensation du préjudice par des contributions de restructuration). En matière d’insolvabilité, une procédure distincte est requise pour chaque personne morale ; une insolvabilité globale n’est pas prévue par le droit allemand. Les restructurations transfrontalières sont en outre soumises aux dispositions du Règlement européen sur l’insolvabilité (EuInsVO).