Lexique juridique

Wiki»Legal Lexikon»Pays d’origine sûr

Pays d’origine sûr

Pays d’origine sûr – terme juridique, définition et signification

Notion de « pays d’origine sûr »

Le terme « pays d’origine sûr » désigne une notion centrale du droit d’asile. Il décrit des États pour lesquels une évaluation générale a établi qu’il n’y existe ni persécution politique, ni peine ou traitement inhumain ou dégradant. Le statut juridique de pays d’origine sûr a des conséquences considérables sur la procédure d’asile des personnes originaires de ces pays.

Fondements juridiques en Allemagne

Dispositions légales et définition

La base légale déterminante en Allemagne est la loi sur l’asile (AsylG). La définition ainsi que les conséquences juridiques liées aux pays d’origine sûrs sont notamment réglementées à l’article 29a et à l’annexe II de la loi sur l’asile. Sont ainsi considérés comme pays d’origine sûrs les États où, compte tenu de la situation politique, du cadre légal et de la situation générale, il est garanti qu’aucune persécution au sens de la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, ni aucun traitement ou châtiment inhumain ou dégradant n’a lieu.

La liste concrète des pays d’origine sûrs est déterminée par la loi ou par règlement, réévaluée et actualisée régulièrement. Ce processus respecte les principes de l’État de droit et tient compte de la jurisprudence de la Cour constitutionnelle fédérale ainsi que des prescriptions européennes.

Prescriptions européennes

Au niveau européen, le concept des pays d’origine sûrs est réglé par la directive européenne sur les procédures d’asile 2013/32/UE (article 36). Les États membres peuvent désigner des pays comme pays d’origine sûrs dès lors qu’ils remplissent les critères établis par la directive. La liste allemande doit se conformer à ces exigences, tandis qu’une liste commune au niveau européen est également envisagée.

Effets sur la procédure d’asile

Procédure accélérée

Si une personne sollicitant l’asile provient d’un pays d’origine classé comme sûr, sa demande d’asile est instruite selon une procédure accélérée (§ 29a AsylG). Les autorités partent généralement du principe que la demande doit être rejetée comme manifestement non fondée, à moins que le demandeur ou la demandeuse ne parvienne à justifier et rendre crédible une menace personnelle de persécution en dépit de l’évaluation générale.

Renversement de la charge de la preuve

Une conséquence juridique essentielle de cette classification est le renversement dit de la charge de la preuve. Les demandeurs doivent eux-mêmes fournir des éléments probants substantiels démontrant qu’ils sont exposés à une menace individuelle dans leur pays d’origine. Cela complique considérablement la reconnaissance du statut de protégé.

Protection juridique et référé

En cas de rejet pour caractère manifestement non fondé, la protection juridique des demandeurs issus de pays d’origine sûrs est restreinte. Le recours contre une décision négative n’a généralement pas d’effet suspensif. Les recours prévus par la loi (par ex. demande de référé suspensif) doivent être introduits dans la semaine, avec une motivation particulière.

Critères de détermination des pays d’origine sûrs

Examen de la situation des droits de l’homme

L’inscription d’un État comme pays d’origine sûr exige une évaluation globale de la situation politique, juridique et générale du pays, notamment en ce qui concerne le respect des droits de l’homme garantis par la Convention européenne des droits de l’homme et la Convention de Genève sur les réfugiés. Sont par exemple pris en compte :

  • Structures étatiques fonctionnelles et mécanismes de protection juridique
  • Ordres constitutionnels démocratiques
  • Absence de carence systémique de protection pour certains groupes de personnes
  • Absence générale de persécution politique et de traitement inhumain

Procédure législative et contrôle politique

La décision d’inscrire ou de retirer un État de la liste des pays d’origine sûrs ne peut se faire que par la loi. Le Bundestag est impliqué dans celle-ci et le Bundesrat doit donner son accord.

Approche au cas par cas comme principe de l’État de droit

Malgré la liste, l’examen individuel demeure garanti durant la procédure d’asile : même pour les demandeurs en provenance de pays d’origine sûrs, les risques et particularités individuels doivent être examinés au cours de la procédure.

Jurisprudence et contrôle

Cour constitutionnelle fédérale

La Cour constitutionnelle fédérale a à plusieurs reprises précisé les exigences et limites constitutionnelles applicables à la détermination des pays d’origine sûrs, notamment pour la garantie d’une protection juridique effective et du droit fondamental individuel d’asile selon l’art. 16a GG. La règle des listes ne doit pas conduire à négliger de manière inappropriée les cas particuliers.

Juridictions européennes

De même, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) et la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) contrôlent si les réglementations sont conformes au droit européen et aux normes internationales de protection.

Débat critique et évolution

La classification d’États comme pays d’origine sûrs fait régulièrement l’objet de débats politiques et juridiques. Les critiques avancent que la présomption généralisée de sécurité ne protège pas toujours suffisamment les minorités ou les groupes particulièrement vulnérables. Des réexamens réguliers et des dispositifs de correction conformes à l’État de droit constituent donc une part intégrante du système.

Liste actuelle des pays d’origine sûrs (Allemagne, situation en 2024)

La liste actuelle comprend principalement des pays des Balkans occidentaux (notamment Albanie, Bosnie-Herzégovine, Kosovo, Monténégro, Macédoine du Nord, Serbie), ainsi que le Ghana et le Sénégal. Des élargissements ou modifications sont continuellement examinés en fonction de l’évolution politique.

Littérature et textes juridiques de référence

  • Loi sur l’asile (AsylG)
  • Directive européenne sur la procédure d’asile (2013/32/UE)
  • Convention de Genève relative au statut des réfugiés
  • Convention européenne des droits de l’homme (CEDH)
  • Décisions de la Cour constitutionnelle fédérale
  • Jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne

La notion de « pays d’origine sûr » constitue ainsi un instrument central dans l’examen des demandes d’asile et influe de manière déterminante sur le déroulement de la procédure, les possibilités de recours et l’octroi d’une protection dans le cadre de la procédure d’asile. Sa conception juridique vise principalement à garantir la protection effective des droits fondamentaux et à remplir les obligations internationales de la République fédérale d’Allemagne et de l’Union européenne.

Questions fréquentes

Un pays d’origine sûr entraîne-t-il automatiquement le rejet d’une demande d’asile ?

Non, la qualification d’un État comme pays d’origine sûr au sens de l’article 29a de la loi sur l’asile (AsylG) n’entraîne pas automatiquement le rejet d’une demande d’asile. Elle instaure simplement une présomption légale selon laquelle aucune persécution ne menace dans ce pays. La demande d’une personne venant d’un tel État est examinée selon la soi-disant « procédure accélérée », ce qui implique un traitement plus rapide, des décisions plus promptes et des restrictions sur les possibilités de séjour, telles que l’accès au marché du travail. Les demandeurs peuvent renverser la présomption légale en rendant vraisemblable qu’il existe, dans leur cas particulier, un risque de persécution politique ou de traitements contraires aux droits de l’homme (dite « appréciation au cas par cas »). Ainsi, malgré la provenance d’un pays classé sûr, l’audition et la décision individuelle sont garanties lors de la procédure d’asile.

Quels pays sont actuellement considérés comme pays d’origine sûrs et selon quels critères sont-ils classés ?

La liste des pays d’origine sûrs est fixée à l’annexe II de l’article 29a AsylG et est déterminée sur la base d’un examen approfondi par le législateur. Parmi les pays d’origine sûrs actuels figurent notamment les États membres de l’Union européenne, l’Albanie, la Bosnie-Herzégovine, le Ghana, le Kosovo, le Monténégro, la Macédoine du Nord, le Sénégal et la Serbie. Le classement repose sur une appréciation d’ensemble selon laquelle, dans le pays concerné – de façon générale et durable – il n’existe ni persécution au sens de la Convention de Genève, ni torture, ni peine ou traitement inhumain ou dégradant. Le gouvernement fédéral réexamine régulièrement les critères en s’appuyant sur les rapports de situation et de droits de l’homme et sur les recommandations d’organisations internationales. Toute modification ou extension de la liste nécessite une adaptation législative.

Comment l’exposé individuel d’un demandeur d’asile provenant d’un pays d’origine sûr est-il examiné ?

Même lorsqu’un État d’origine est classé comme sûr, la loi sur l’asile exige un examen individuel de chaque demande d’asile. La présomption légale de sécurité peut être renversée si le ou la demandeuse démontre de manière pertinente et plausible des motifs spécifiques de persécution ou un danger pour sa vie, son intégrité physique ou sa liberté dans le pays d’origine. Cela concerne en particulier les situations où les raisons invoquées se fondent sur des caractéristiques spécifiques (par exemple orientation sexuelle, religion, conviction politique) ou des situations régionales particulières dans le pays d’origine. La charge de la preuve de la réfutation de la présomption légale pèse entièrement sur les demandeurs.

Quels sont les recours possibles en cas de rejet d’une demande d’asile provenant d’un pays d’origine sûr ?

Si une demande d’asile est rejetée comme « manifestement non fondée » en raison de la provenance d’un pays d’origine sûr, les possibilités de recours sont limitées. Le recours contre la décision négative n’a pas d’effet suspensif (§ 36 AsylG). Les demandeurs peuvent introduire un recours devant le tribunal administratif dans un délai d’une semaine et, simultanément, une demande de suspension de l’exécution. Le tribunal examine le recours et la demande de référé quant au fond, mais se concentre surtout sur la crédibilité d’une situation de menace individuelle. Un autre recours (appel ou pourvoi) est généralement exclu dès lors que le tribunal rejette le recours comme infondé.

Quelles sont les conséquences de la classification comme pays d’origine sûr pour l’hébergement et l’obligation de résidence ?

Les demandeurs d’asile issus de pays d’origine jugés sûrs sont tenus de rester dans un centre d’accueil jusqu’à la fin de leur procédure d’asile. Cette obligation peut, dans certaines circonstances, durer jusqu’à six mois, voire jusqu’au départ du territoire (§ 47 AsylG). Durant ce séjour, s’appliquent des limitations de liberté de mouvement (obligation de résidence) et de nombreuses restrictions juridiques, notamment en matière d’aide sociale ou d’accès au marché du travail. Ces règles visent à accélérer le traitement de la demande et à permettre l’exécution immédiate d’une obligation de quitter le territoire en cas de rejet.

Le statut de pays d’origine sûr peut-il être contrôlé par un tribunal ?

La qualification d’un pays comme sûr résulte d’une procédure législative formelle et ne peut pas être contestée par les tribunaux administratifs au cas par cas. Toutefois, dans le cadre d’une procédure d’asile concrète, il est possible de faire valoir que les conditions qui ont motivé la présomption de sécurité ne s’appliquent pas individuellement, par exemple en raison de persécutions visant certains groupes ou d’évolutions récentes (telles que des bouleversements politiques, des conflits violents). Une nouvelle situation dans le pays d’origine peut justifier un réexamen par le législateur ; cependant, les tribunaux ne peuvent vérifier que si, au cas par cas, la présomption légale d’absence de persécution est effectivement réfutée.

Existe-t-il des exceptions aux conséquences juridiques de la réglementation relative aux pays d’origine sûrs ?

Oui, des exceptions sont possibles en particulier pour les mineurs et les personnes particulièrement vulnérables. Dans le cadre du « principe de vulnérabilité », les mineurs non accompagnés, les survivants de la torture ou de la traite humaine ainsi que les personnes gravement malades bénéficient de normes de protection spécifiques. Dans de tels cas, la procédure accélérée peut être suspendue ou prolongée et l’expulsion ajournée jusqu’à clarification de la situation. Les droits fondamentaux généraux, et notamment l’exigence d’un recours effectif et l’interdiction de refoulement vers un pays où existe un danger pour la vie ou l’intégrité physique (principe de non-refoulement), restent pleinement applicables.