Mesures de sûreté – Fondements juridiques et domaines d’application
Définition et distinctions
Les mesures de sûreté sont des mesures ordonnées par l’État dans le droit pénal allemand, destinées à protéger la collectivité contre des auteurs dangereux. Contrairement aux peines, les mesures de sûreté ne visent ni la rétribution ni l’expiation, mais la prévention d’atteintes graves ultérieures à des biens juridiques. Elles peuvent être prononcées en complément ou indépendamment d’une peine et sont principalement régies par le Code pénal (StGB), notamment aux §§ 61 et suivants StGB.
Fondements juridiques
Réglementations dans le Code pénal (StGB)
Les §§ 61 à 72 StGB traitent des différentes sortes, conditions et conséquences juridiques des mesures de sûreté. Le système des mesures de sûreté fait partie du droit allemand d’exécution des mesures de sûreté et se distingue des peines tant par son objectif que par sa nature juridique.
Rapport avec d’autres mesures
Les mesures de sûreté doivent être distinguées des peines accessoires, des mesures avec sursis et des autres mesures préventives. Selon la dualité du système des sanctions allemand, une personne peut se voir infliger une peine et, si nécessaire, se voir imposer une mesure de sûreté supplémentaire. Exceptionnellement, une mesure de sûreté peut être ordonnée sans condamnation à une peine, par exemple en cas d’irresponsabilité pénale (§ 63 StGB).
Types de mesures de sûreté
Le Code pénal allemand prévoit plusieurs mesures de sûreté aux objectifs divers. Parmi les principales figurent :
1. Placement en hôpital psychiatrique (§ 63 StGB)
Cette mesure est ordonnée à l’encontre de personnes qui, en raison d’un trouble psychique grave et des infractions qui en découlent, représentent un danger pour la société. Elle suppose que l’auteur soit soit pénalement irresponsable, soit d’une responsabilité diminuée.
2. Placement dans un établissement de désintoxication (§ 64 StGB)
Ici, le placement concerne les personnes ayant une dépendance à la consommation excessive de substances enivrantes et ayant commis des infractions en conséquence, lorsqu’elles sont considérées comme dangereuses. L’objectif est l’amélioration et la protection de la collectivité.
3. Placement en rétention de sûreté (§ 66 et suivants StGB)
La rétention de sûreté est une privation de liberté illimitée dans le temps pour les récidivistes particulièrement dangereux après l’exécution d’une peine. Elle est soit « réservée » dans le jugement, soit ordonnée immédiatement et sert exclusivement à protéger la société contre des infractions graves.
4. Surveillance aux fins de conduite (§ 68 et suivants StGB)
La surveillance oblige la personne concernée, après l’exécution d’une peine ou d’une mesure, à respecter des obligations et instructions spécifiques. L’objectif est le contrôle et l’accompagnement afin d’éviter la récidive.
5. Retrait du permis de conduire (§ 69 StGB)
La mesure de sûreté du retrait du permis de conduire est prononcée pour des infractions en lien avec la conduite de véhicules à moteur, lorsque l’auteur s’est révélé inapte à la conduite.
6. Interdiction professionnelle (§ 70 StGB)
Lorsqu’une interdiction professionnelle est prononcée, l’auteur est exclu de l’exercice d’un certain métier, d’une profession ou d’un secteur, tant qu’il existe un danger significatif pour la collectivité.
Ordonnance, durée et levée
Conditions
L’ordonnance d’une mesure de sûreté requiert toujours une décision judiciaire. Dans son jugement, le tribunal doit examiner et motiver rigoureusement les conditions légales, notamment au regard du pronostic de dangerosité. Le potentiel de danger actuel et futur émanant de la personne concernée est déterminant.
Durée des mesures
La durée dépend du danger individuel et de la progression du but de la mesure (par ex. amélioration, sécurisation). Les §§ 67d, 67e, 67h StGB contiennent des dispositions spécifiques relatives au contrôle et à la levée. La rétention de sûreté et le placement en hôpital psychiatrique doivent notamment faire l’objet d’un réexamen régulier.
Protection juridique
Les personnes concernées peuvent demander un contrôle judiciaire de l’ordonnance, de la prolongation ou de l’exécution des mesures de sûreté, soit par voie de recours, soit par l’introduction d’un moyen juridique conformément au code de procédure pénale (en particulier §§ 454, 463 StPO).
Conséquences juridiques et exécution
Séparation entre exécution des mesures et peine
Les mesures d’amélioration et de sûreté sont exécutées dans un régime spécifique. Cela vaut notamment pour le placement psychiatrique ou la rétention de sûreté, qui doivent être distingués spatialement et matériellement de l’exécution des peines. Les modalités de l’exécution des mesures de sûreté sont fixées dans les lois des Länder.
Effets sur d’autres domaines juridiques
Les mesures de sûreté peuvent entraîner des décisions ultérieures, par exemple la durée de la surveillance ou la prolongation/non-prolongation de mesures. Des conséquences en matière de droit social et civil sont également possibles, notamment concernant les droits alimentaires ou à la retraite.
Historique et réformes
Les mesures de sûreté ont été introduites dans le droit allemand avec le Code pénal du Reich en 1933 et ont été plusieurs fois réformées, en dernier lieu de manière fondamentale lors de la réforme du fédéralisme relative à l’exécution des mesures de sûreté. Des modifications ont notamment été apportées à la suite des exigences de la Cour constitutionnelle fédérale concernant la proportionnalité, le placement et les offres de prise en charge thérapeutique dans le domaine de la rétention de sûreté.
Classement international
Des instruments comparables existent dans de nombreux systèmes juridiques. La séparation matérielle et institutionnelle entre peine et mesure de sûreté est caractéristique du système allemand. La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a examiné différentes dispositions nationales relatives à la rétention de sûreté et à l’exécution des mesures au regard de leur compatibilité avec la Convention européenne des droits de l’homme.
Littérature et sources juridiques complémentaires
- Code pénal (StGB), §§ 61 et suivants
- Code de procédure pénale (StPO), dispositions pertinentes
- Loi fédérale sur le registre central (BZRG)
- Lois des Länder sur l’exécution des mesures de sûreté
- Cour constitutionnelle fédérale (divers arrêts relatifs à la rétention de sûreté)
- Littérature : Fischer, Strafgesetzbuch, commentaire ; Kinzig, Mesures d’amélioration et de sûreté
Remarque : L’application et l’interprétation précises des mesures de sûreté doivent être effectuées au cas par cas par les tribunaux, en tenant compte des connaissances scientifiques actuelles, notamment au sujet du pronostic de dangerosité. Toute modification de la législation ou de la jurisprudence doit également être prise en considération.
Questions fréquemment posées
Quand des mesures de sûreté sont-elles ordonnées en droit pénal allemand ?
Les mesures de sûreté sont ordonnées en droit pénal allemand comme mesures spéciales à côté ou à la place de la peine lorsqu’elles sont nécessaires pour protéger la collectivité contre d’autres infractions dangereuses. Elles s’appliquent notamment lorsqu’un auteur présente, en raison de circonstances particulières, un risque accru pour la sécurité publique. L’ordonnance a principalement lieu lorsque les conditions des §§ 61 et suivants StGB sont réunies et qu’une sanction pénale classique ne semble pas suffisante pour prévenir de futurs délits. L’ordonnance concrète d’une mesure de sûreté exige en règle générale une expertise afin de garantir juridiquement le pronostic de dangerosité.
Quelles sortes de mesures de sûreté prévoit le Code pénal ?
Le Code pénal (StGB) prévoit différentes sortes de mesures de sûreté, définies aux §§ 61 et suivants StGB. Il s’agit notamment du placement en hôpital psychiatrique (§ 63 StGB), du placement en établissement de désintoxication (§ 64 StGB), de la rétention de sûreté (§ 66 StGB), de l’interdiction professionnelle (§ 70 StGB), de l’interdiction de conduire (§ 69 StGB) ainsi que du retrait du permis de conduire (§ 69 StGB), de l’interdiction de travailler avec des enfants et adolescents (§ 70c StGB) et de la surveillance (§ 68 StGB). Chacune de ces mesures répond à des conditions spécifiques, prévues par la loi, et poursuit un objectif de protection et de prévention qui lui est propre.
Qui décide de l’ordonnance d’une mesure de sûreté et comment se déroule la procédure ?
Seul le tribunal, dans le cadre de la procédure pénale, en général au cours du procès principal, décide de l’ordonnance d’une mesure de sûreté. Ce sont la conviction du juge quant à la nécessité et à la légalité de la mesure qui priment, sachant que dans les cas nécessitant une expertise médicale ou psychologique, un expert est généralement mandaté. La procédure judiciaire suit les principes de l’État de droit ; la personne concernée dispose de droits de défense étendus. La mesure est clairement ordonnée dans le jugement et elle est, à la différence des peines accessoires, sujette à un recours indépendant.
En quoi l’ordonnance d’une mesure de sûreté diffère-t-elle de la fixation de la peine ?
Les mesures de sûreté se distinguent fondamentalement de la peine à proprement parler, car elles ne poursuivent pas un objectif de rétribution, mais de prévention et de défense contre le danger. Tandis que la fixation de la peine se concentre sur la culpabilité individuelle et la gravité de l’infraction, l’accent des mesures de sûreté est mis sur la protection de la collectivité contre de potentielles infractions futures de l’auteur. L’ordonnance intervient indépendamment de la question de la culpabilité, par exemple en cas d’irresponsabilité pénale ou de responsabilité diminuée, et peut également être prononcée en plus d’une peine d’emprisonnement.
Combien de temps durent les mesures de sûreté et peuvent-elles être levées ?
La durée d’une mesure de sûreté dépend de sa nature et des prescriptions légales. Certaines mesures, comme l’interdiction de conduire, sont limitées dans le temps, alors que d’autres, comme le placement en hôpital psychiatrique ou la rétention de sûreté, peuvent, en principe, être illimitées. Dans ces cas, il convient toutefois d’examiner régulièrement si les conditions d’application demeurent. Le contrôle a lieu à des intervalles prévus par la loi, au moins une fois par an. Si la mesure n’est plus justifiée, elle doit être levée.
Quels sont les mécanismes de protection et de recours juridiques dont disposent les personnes concernées ?
Les personnes concernées par une mesure de sûreté disposent de différents recours tant au stade de l’instruction que postérieurement à l’entrée en vigueur de la mesure. Un recours (appel ou révision) peut être formé contre l’ordonnance. De plus, les intéressés peuvent demander régulièrement un contrôle judiciaire de la prolongation de la mesure (par ex. selon § 67e StGB). Indépendamment de cela, les établissements tels que l’hôpital psychiatrique ou l’établissement de désintoxication sont soumis à un contrôle judiciaire conformément à la loi sur l’hospitalisation des personnes souffrant de troubles psychiques (PsychKG) ainsi qu’à d’autres dispositions légales spécifiques.
Quel rôle joue le pronostic de dangerosité lors de l’ordonnance d’une mesure de sûreté ?
Le pronostic de dangerosité est un critère central pour l’ordonnance de presque toutes les mesures de sûreté. Il s’agit d’évaluer si, et dans quelle mesure, il faut s’attendre à des infractions graves de la part de l’auteur à l’avenir. Ce pronostic doit se fonder sur des éléments concrets et repose en général sur des expertises médico-légales ou psychologiques. Le tribunal est tenu d’apprécier le pronostic de manière critique et ne peut s’y rallier que si les conditions légales sont remplies sans ambiguïté. À défaut de pronostic fiable, l’ordonnance n’est pas juridiquement admissible.