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Liberté d’évaluation

Notion et nature de la liberté d’appréciation

La liberté d’appréciation est un principe central du droit allemand, en particulier en droit fiscal et en droit civil. Elle décrit la faculté, pour les décideurs, d’exercer un pouvoir d’appréciation personnel lors de l’évaluation de situations au moyen de jugements de valeur (appréciations, estimations, prévisions), dans les limites de leur propre responsabilité. La liberté d’appréciation implique des limites à la vérification de telles évaluations par les tribunaux et autorités, car ces jugements reposent fondamentalement sur des appréciations subjectives et des pondérations expertes, et ne peuvent donc être contrôlés uniquement selon des critères objectifs et rigides.

La liberté d’appréciation se distingue de la délégation de pouvoir discrétionnaire (pouvoir discrétionnaire) et de la décision liée, en ce qu’elle permet non seulement une appréciation juridique mais inclut également une véritable évaluation des faits.


Fondements dogmatiques juridiques

Distinction entre liberté d’appréciation et liberté d’appréciation discrétionnaire et constatation des faits

La liberté d’appréciation concerne l’évaluation des faits, à la différence de la constatation des faits elle-même, qui fait l’objet d’un contrôle juridictionnel complet. Elle se distingue du pouvoir discrétionnaire en ce que la liberté d’appréciation permet d’interpréter et de pondérer certains faits ou opérations économiques, tandis que le pouvoir discrétionnaire consiste à choisir entre plusieurs options juridiquement admissibles.

Fondement constitutionnel

La liberté d’appréciation découle du principe de l’État de droit (art. 20 al. 3 GG), ainsi que du principe de la réserve de la loi et de la séparation des pouvoirs. Elle garantit que des décideurs spécialisés puissent évaluer de manière autonome et adéquate des situations complexes, sans que les tribunaux ou autorités de tutelle ne substituent leurs propres appréciations.


Liberté d’appréciation en droit fiscal

Principe et domaines d’application

En droit fiscal, la liberté d’appréciation revêt une importance particulière, par exemple lors de la comptabilisation et de l’évaluation des biens (§§ 5, 6 EStG) ou lors de la fixation des valeurs vénales à des fins fiscales (§ 194 BauGB). Les contribuables disposent, dans les limites légales (p. ex., prescriptions d’évaluation, GoB), d’une marge de manœuvre concernant les estimations, la prise en compte de la valeur actuelle ou la probabilité d’évolution des valeurs.

Limitations et obligations

La liberté d’appréciation s’arrête là où des critères d’évaluation légaux sont impératifs ou lorsque le pouvoir de choix (p. ex. via des simplifications ou abattements d’évaluation) est limité. Elle n’existe que dans la mesure où la décision d’évaluation ne viole pas manifestement des normes (notamment l’interdiction de l’arbitraire, le principe de prééminence des normes) ou le principe de la bonne foi (§ 242 BGB).

Jurisprudence concernant la liberté d’appréciation

La jurisprudence reconnaît la liberté d’appréciation notamment en ce qui concerne la manière dont, lors de la détermination des revenus, il existe une liberté d’application des jugements dans le cadre d’une comptabilité appropriée ou de méthodes d’évaluation légales (voir BFH, arrêt du 8 novembre 1960 – I 352/59 U ; BVerwG, arrêt du 19 février 1963 – I C 127.61).


Liberté d’appréciation en droit civil

Liberté d’appréciation dans les jugements de valeur et prévisions

En droit civil, la liberté d’appréciation concerne en particulier l’évaluation des inexécutions contractuelles, du montant des dommages ou du niveau d’effort d’exécution raisonnable. Elle s’applique notamment lors de la détermination du caractère adéquat des délais, des droits à indemnisation ou des droits de rétractation.

Distinction entre décisions liées et marge d’appréciation

La marge d’appréciation en droit civil diffère des décisions liées, déterminées par des normes strictes, et s’applique pour les jugements de valeur, les prévisions et les hypothèses de probabilité. Les tribunaux ne vérifient que si l’évaluation est raisonnable et cohérente, mais pas l’appréciation concrète elle-même.


Liberté d’appréciation dans d’autres domaines

Droit administratif

En droit administratif, la liberté d’appréciation intervient fréquemment lors de l’évaluation de l’aptitude, des compétences et des performances professionnelles dans le cadre de décisions de sélection (par ex. évaluations fonctionnelles de la fonction publique). Elle s’applique aussi à l’évaluation de la fiabilité ou de la prévision de dangerosité dans des procédures relevant du droit de la sécurité.

Droit de la concurrence et marchés publics

En droit de la concurrence et des marchés publics, la liberté d’appréciation joue un rôle lors de la définition des critères et de la pondération des évaluations d’offres. Le contrôle juridictionnel est alors limité aux violations des critères d’évaluation ou aux erreurs manifestes d’appréciation.


Contrôle et vérifiabilité de la liberté d’appréciation

Limites du contrôle judiciaire

Les tribunaux vérifient les décisions d’appréciation uniquement quant à leur conformité technique, leur absence d’arbitraire et le respect des règles de procédure (contrôle dit « d’évidence »). Une substitution de l’appréciation par le tribunal n’a en principe pas lieu.

Abus et correction des erreurs

Si des décisions d’évaluation sont erronées, injustifiables, contradictoires ou fondées sur des considérations non pertinentes, une correction ou une annulation peut avoir lieu. Le contrôle porte notamment sur le respect des exigences légales et méthodologiques ainsi que sur la cohérence et la traçabilité du processus d’évaluation.


Résumé et importance

La liberté d’appréciation constitue une marge de manœuvre décisionnelle importante dans le droit allemand et complète d’autres formes de décision, telles que le pouvoir discrétionnaire, en permettant l’appréciation libre des circonstances de fait. Elle assure l’adaptabilité du droit aux situations complexes de fait et d’évaluation et limite les interventions de l’État et des tribunaux aux seules erreurs manifestes d’appréciation. La liberté d’appréciation est ainsi un principe essentiel pour garantir des décisions expertes et flexibles, contribuant de manière significative au bon fonctionnement du système juridique et administratif.


Voir aussi :

Sources juridiques et littérature complémentaire :

  • Loi sur l’impôt sur le revenu (EStG)
  • Loi sur l’évaluation (BewG)
  • Code civil allemand (BGB), notamment §§ 242, 249 suiv.
  • Bundesverwaltungsgericht, arrêt du 19.02.1963 – I C 127.61
  • Bundesfinanzhof, arrêt du 08.11.1960 – I 352/59 U

Questions fréquemment posées

Les méthodes d’évaluation dans le bilan peuvent-elles être choisies librement ou existent-elles des règles légales ?

Dans le contexte juridique, la liberté d’évaluation dans le bilan est restreinte par de nombreuses prescriptions et cadres légaux. Fondamentalement, le Code de commerce allemand (HGB) ainsi que, le cas échéant, les normes internationales de comptabilité (comme les IFRS) régissent les méthodes d’évaluation autorisées. Les entreprises disposent certes, dans certaines limites, d’options de choix (par exemple pour l’évaluation des stocks selon FIFO ou LIFO, dans la mesure où cela est autorisé), mais elles sont tenues de respecter les principes comptables fondamentaux (GoB), notamment les principes de clarté, de véracité et de prudence. Le cadre légal détermine en outre, pour certains actifs et dettes, comment ils doivent être évalués (par exemple, l’évaluation des immobilisations au coût d’acquisition ou de production, déduction faite des amortissements conformément au § 253 HGB). La liberté d’évaluation est donc particulièrement limitée par des critères obligatoires et des restrictions prévues par le droit commercial ou fiscal, de sorte qu’un libre choix total est exclu.

Dans quelle mesure le droit fiscal concerne-t-il la liberté d’évaluation ?

Le droit fiscal a une influence significative sur la liberté d’appréciation, notamment par le principe de prééminence des comptes annuels commerciaux (§ 5 al. 1 EStG), selon lequel les évaluations effectuées dans le bilan commercial sont en principe également déterminantes pour le bilan fiscal. Toutefois, il existe des dispositions fiscales spécifiques qui divergent de la réglementation commerciale et doivent être respectées, telles que le principe de la plus faible valeur (§ 6 al. 1 n° 2 EStG) ou des règles particulières d’amortissement. Ces règles fiscales resserrent davantage les marges de manœuvre prévues par le droit commercial. Les options autorisées par le droit commercial ne doivent pas toujours être reproduites fiscalement ; inversement, les prescriptions fiscales imposent parfois des critères plus stricts ou différents, lesquels restreignent ou influencent la liberté d’évaluation comptable.

Quelles sanctions encourt-on en cas de violation des règles d’évaluation ?

Les violations des règles légales d’évaluation peuvent avoir des conséquences graves dans un contexte juridique. En premier lieu, des actions en responsabilité civile peuvent être intentées par des associés, créanciers ou autres parties prenantes lorsqu’une violation a conduit de manière avérée à de mauvaises décisions. Sont particulièrement graves les violations entraînant une présentation inexacte de la situation patrimoniale, financière ou de résultat (§ 264 al. 2 HGB). Le gérant ou membre du directoire responsable peut alors engager sa responsabilité pénale selon le § 331 HGB ou le § 400 AktG – cela inclut, dans les cas les plus graves, des peines d’emprisonnement ou de fortes amendes. En outre, une sous-évaluation d’impôts liée à une erreur d’appréciation peut déclencher un redressement fiscal ou des poursuites pénales. Enfin, il existe un risque que les comptes ne soient pas certifiés par les commissaires aux comptes, ce qui peut entraîner de graves conséquences économiques.

Existe-t-il des différences dans la liberté d’évaluation entre petites et grandes entreprises ?

Le législateur distingue, en droit commercial (en particulier HGB), les entreprises selon leur taille (micro, petites, moyennes et grandes entreprises). Ces catégories ont des conséquences sur les règles d’évaluation et l’exercice des options de choix. Les petites entreprises bénéficient d’allègements, tels que la possibilité de renoncer à établir une annexe ou un rapport de gestion (§§ 266 s. HGB) et peuvent parfois recourir à des méthodes d’évaluation simplifiées. Cependant, des exigences minimales s’appliquent aussi à elles, notamment pour la détermination du résultat annuel. Pour les grandes entreprises, des obligations plus détaillées et strictes existent concernant la documentation, les critères d’évaluation et la publication. Ainsi, la liberté d’évaluation réelle est, dans la pratique, généralement plus restreinte pour les grandes entreprises que pour les petites.

Quelle est l’importance du principe de prudence en matière de liberté d’évaluation ?

Le principe de prudence (§ 252 al. 1 n° 4 HGB) compte parmi les principes fondamentaux du droit comptable et limite fortement la liberté d’évaluation. Il impose la retenue dans l’évaluation, c’est-à-dire que les produits ne doivent être pris en compte que lorsqu’ils sont réalisés, alors que les pertes et les risques doivent l’être dès qu’ils sont identifiables. En cas de doute, il convient de choisir la valeur la moins favorable à l’entreprise. Le principe de prudence limite ainsi considérablement la liberté de la direction dans la détermination des valeurs et protège les créanciers et investisseurs contre des bilans trop optimistes et les risques qui en découlent.

Quelles obligations de reporting existent en lien avec les décisions d’évaluation ?

Les décisions d’évaluation fondées sur des options prévues par le droit commercial ou fiscal sont souvent assorties d’obligations de reporting spécifiques. Dans l’annexe (§§ 284 s. HGB), l’entreprise doit généralement divulguer les méthodes de comptabilisation et d’évaluation appliquées, expliquer les éventuels changements par rapport à l’exercice précédent et présenter leurs incidences sur la situation patrimoniale, financière et de résultat. De plus, la publication des décisions relevant du pouvoir discrétionnaire et des estimations peut être exigée dans certains cas – notamment lorsqu’elles influent de manière significative sur la présentation de l’entreprise. Le reporting vise ainsi à assurer la transparence pour les destinataires des comptes et la traçabilité de l’exercice – encore limité – de la liberté d’évaluation.

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