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Interdiction de la double condamnation

Interdiction de la double incrimination

L’interdiction de la double incrimination, souvent appelée au niveau international le principe « ne bis in idem », constitue un principe central des États de droit modernes. Elle stipule que nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement plusieurs fois pour les mêmes faits. Ce principe fondamental protège la personne concernée contre des poursuites pénales multiples par l’État et il est fermement ancré tant au niveau national qu’international. Les différents aspects juridiques, le cadre systématique ainsi que la portée pratique de l’interdiction de la double incrimination sont expliqués en détail ci-après.


Bases juridiques

Droit national

En droit allemand, l’interdiction de la double incrimination est consacrée à l’article 103 alinéa 3 de la Loi fondamentale (GG). Il y est précisé : « Nul ne peut être puni plusieurs fois pour la même infraction sur la base des lois pénales générales. » En outre, des précisions légales se trouvent, par exemple, à l’article 84 alinéa 1 de la Loi sur les infractions administratives (OWiG) et à l’article 264 du Code de procédure pénale (StPO).

Droit international et européen

Au niveau européen, l’interdiction de la double incrimination est consacrée à l’article 50 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ainsi qu’à l’article 4 du 7e Protocole additionnel à la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH). Un principe équivalent existe dans le Statut de Rome de la Cour pénale internationale (art. 20).


Champ d’application

Champ d’application matériel

L’interdiction s’étend en principe à toutes les procédures pénales, mais elle ne s’applique qu’aux « mêmes faits ». Cette notion est déterminée selon la conception dite des « faits de la vie » – ce qui est déterminant, c’est la situation factuelle sous-jacente, et non seulement la qualification pénale.

Il convient de noter que, outre l’identité factuelle, l’appréciation juridique joue également un rôle. Si différentes qualifications pénales sont concernées, l’interdiction de la double incrimination n’est applicable que si elles portent sur les mêmes faits matériels.

Champ d’application personnel

L’interdiction de la double incrimination protège toute personne dans le cadre d’une procédure pénale, indépendamment de sa nationalité ou de son statut de suspect, d’accusé ou de condamné. Les personnes morales peuvent également être protégées, dès lors qu’elles font l’objet de procédures pénales ou d’amendes.


Importance pratique et conséquences juridiques

Clôture de la procédure

L’interdiction de la double incrimination suppose qu’une décision définitive ait déjà été rendue sur les faits en cause. L’ouverture d’une nouvelle procédure pénale pour les mêmes faits n’est alors pas permise. Les procédures déjà entamées doivent être clôturées et les décisions correspondantes annulées.

Affaires transfrontalières

L’interdiction de la double incrimination s’applique en principe dans le champ d’application de chaque ordre juridique. Avec l’entrée en vigueur de la Convention d’application de Schengen (CAAS), ainsi que par la CEDH et la Charte des droits fondamentaux de l’UE, le principe a été étendu à l’ensemble de l’espace européen : une personne ne peut pas être poursuivie à nouveau pour les mêmes faits dans un État membre de l’Union européenne si une décision définitive a déjà été rendue dans un autre État membre (interdiction de la double incrimination transfrontalière, art. 54 CAAS).


Rapport avec d’autres sanctions

Sanctions administratives

Une distinction doit être faite lorsque des mesures administratives sont prises en plus des sanctions pénales. Il est déterminant de savoir si la sanction administrative doit, par sa nature, être qualifiée d’« infraction pénale » au sens de la Convention européenne des droits de l’homme ou de la Charte des droits fondamentaux de l’UE. La jurisprudence Engel de la Cour européenne des droits de l’homme est ici particulièrement pertinente, car elle permet d’assimiler certaines mesures administratives à une sanction pénale.

Ordonnances pénales, amendes administratives et infractions

Le champ d’application s’étend également aux ordonnances pénales et aux amendes administratives, dès lors qu’elles sont devenues définitives. S’il est engagé, pour les mêmes faits, à la fois une procédure d’amende et une procédure pénale, cela n’est permis que tant qu’aucune décision définitive n’a été rendue. Une fois la décision définitive intervenue, toute autre procédure est exclue.


Exceptions et limitations

Malgré la large protection offerte, certaines exceptions à l’interdiction de la double incrimination sont prévues. Ainsi, une procédure de révision au détriment de la personne condamnée ou acquittée peut être possible dans les limites strictes des art. 359 et suivants du Code de procédure pénale (StPO), sans porter atteinte à l’interdiction. Il est aussi possible de poursuivre dans différents États en dehors de l’Union européenne, sauf dispositions contraires du droit international.


Contexte systématique et objectifs

L’interdiction de la double incrimination constitue un élément fondamental du principe de l’État de droit. Elle vise à protéger l’individu contre des poursuites arbitraires multiples, à garantir la sécurité juridique et à prévenir le risque de harcèlement par des sanctions répétées. Ce principe garantit qu’après une décision définitive, la prétention punitive de l’État s’éteint et que l’individu bénéficie d’une sécurité personnelle et économique dans sa planification.


Comparaison internationale et importance pratique

Au niveau international, l’interdiction de la double incrimination est un principe généralement reconnu. Il revêt une importance particulière dans la lutte contre la criminalité transfrontalière, notamment en matière d’infractions économiques ou de criminalité organisée. Au sein de l’Union européenne, le principe ne bis in idem accompagne l’objectif de création d’un espace judiciaire européen, visant à promouvoir la confiance mutuelle dans les différents systèmes juridiques et à éviter les poursuites multiples.


Doctrine et jurisprudence

La jurisprudence de la Cour constitutionnelle fédérale, de la Cour européenne des droits de l’homme et de la Cour de justice de l’Union européenne revêt une importance centrale, car elle a précisé l’interdiction de la double incrimination dans de nombreuses décisions. Des arrêts de principe clarifient en particulier l’interprétation de la notion de fait, la question de l’autorité de la chose jugée et la portée transfrontalière du principe au sein de l’Union européenne.


Conclusion

L’interdiction de la double incrimination est un principe fondamental qui garantit tant au niveau national qu’international la paix sociale et la confiance dans l’État de droit. Elle protège l’individu contre une poursuite et une sanction multiples pour les mêmes faits, mais reste néanmoins conçue de façon différenciée afin d’assurer une justice pénale équitable et efficace. Dans un contexte juridique en constante évolution, notamment en Europe, ce principe demeure un élément essentiel de la protection juridique individuelle.


Questions fréquentes

Comment l’interdiction de la double incrimination est-elle appliquée en Allemagne ?

En Allemagne, l’interdiction de la double incrimination est réglementée notamment par l’article 103 alinéa 3 de la Loi fondamentale (GG) et l’article 1 du Code pénal (StGB). Elle prévoit que nul ne peut être puni plusieurs fois pour les mêmes faits. En pratique, cela signifie qu’après une décision de justice pénale devenue définitive concernant un fait, aucune nouvelle procédure pénale ne peut être ouverte, ni de nouvelle peine prononcée pour les mêmes faits. Cela inclut également l’interdiction de sanctions multiples pour des actes identiques par différentes juridictions pénales sur le territoire allemand. L’autorité de la chose jugée est un critère central : si un jugement de première instance qui ne peut plus être attaqué produit ses effets, une nouvelle procédure est exclue. En outre, les procédures entamées et conclues doivent être respectées. En matière d’infractions administratives et de procédures administratives, des règles analogues figurent dans la Loi sur les infractions administratives (OWiG). Les procédures de révision ont ici un rôle particulier, puisqu’elles permettent exceptionnellement, sous des conditions strictes, une nouvelle appréciation après la clôture d’une procédure.

L’interdiction de la double incrimination s’applique-t-elle aussi aux infractions fiscales et administratives ?

L’interdiction de la double incrimination ne s’applique pas uniquement au droit pénal, mais s’étend également aux infractions administratives, telles que celles prévues par la Loi sur les infractions administratives (OWiG). Selon l’article 84 de l’OWiG, nul ne peut, pour les mêmes faits déjà sanctionnés comme infraction administrative, être soumis à nouveau à une sanction. Cela signifie qu’un acte déjà sanctionné avec autorité de la chose jugée – par exemple une infraction au code de la route – ne peut plus faire l’objet d’une nouvelle amende ou d’autres mesures. En droit fiscal, ce principe figure à l’article 398a du Code fiscal (AO) et s’applique en particulier, dans le contexte de la dénonciation spontanée prévue à l’article 371 AO, à la prévention des doubles sanctions pour des fraudes fiscales identiques – par exemple, la coexistence de l’infraction fiscale et de l’infraction administrative pour les mêmes faits. Il convient ici de distinguer la poursuite parallèle d’un délit et d’une infraction administrative, tant que les deux procédures portent sur les mêmes faits.

Quelles sont les limitations concernant l’application internationale du principe de la double incrimination ?

La dimension internationale de l’interdiction de la double incrimination est complétée en droit allemand par des dispositions de droit international et européen. L’article 54 de la Convention d’application de Schengen (CAAS) protège en principe une personne contre des poursuites et des peines pénales dans plusieurs États parties pour les mêmes faits. Il existe toutefois des exceptions, par exemple lorsque le jugement du premier État n’a pas été exécuté. Au niveau de l’UE, l’interdiction est également prévue à l’article 50 de la Charte des droits fondamentaux, mais elle se limite aux procédures dans les États membres ayant poursuivi l’infraction. En dehors de l’Europe ou dans les relations avec des pays sans engagement conventionnel, l’interdiction nationale ne s’applique pas ; chaque État peut engager indépendamment des poursuites. La pratique internationale de l’extradition est en principe limitée par ce principe lorsqu’un accord le prévoit.

Que signifie la notion de « mêmes faits » dans le contexte de l’interdiction de la double incrimination ?

Au regard du droit, l’interprétation de ce que recouvre l’expression « mêmes faits » est déterminante pour l’application du principe. La jurisprudence allemande suit la notion dite de « faits procéduraux ». Ainsi, les « mêmes faits » recouvrent le déroulement historique unique ayant conduit à l’action des autorités de poursuite, indépendamment de la qualification juridique ou de la règle pénale précise applicable. Ce qui importe, c’est donc que la situation factuelle de la précédente décision soit identique à celle qui devrait faire l’objet d’une nouvelle procédure. La distinction devient particulièrement significative, par exemple, lorsqu’un comportement viole plusieurs normes juridiques ou porte atteinte à divers intérêts juridiques.

Comment évaluer la relation entre sanctions pénales et mesures administratives ?

L’interdiction de la double incrimination concerne principalement les sanctions pénales, mais elle peut aussi s’appliquer à certaines mesures administratives si celles-ci présentent un caractère répressif. Ainsi, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a reconnu à plusieurs reprises que des amendes ou des mesures pécuniaires à caractère pénal (« criminal charge ») pouvaient être concernées. En Allemagne, certaines mesures – comme une interdiction de conduire après une infraction pénale ou une telle interdiction après une infraction administrative – ne sont pas nécessairement considérées comme une double peine dès lors qu’elles poursuivent des intérêts juridiques ou des objectifs différents. En revanche, lorsque plusieurs mesures sont cumulées pour les mêmes faits, une double sanction non autorisée peut exister. L’appréciation concrète dépend du but, du caractère et de la gravité de la mesure.

Quel est le rôle des procédures de révision dans le contexte de l’interdiction de la double incrimination ?

Les procédures de révision selon les articles 359 et suivants du Code de procédure pénale (StPO) permettent exceptionnellement une nouvelle révision judiciaire d’une décision devenue définitive. Ceci constitue une dérogation au principe de l’autorité de la chose jugée qui sous-tend l’interdiction de la double incrimination, mais uniquement dans les conditions strictement définies, par exemple en cas de nouveaux moyens de preuve ou d’erreurs manifestes de procédure. La révision ne doit pas être comprise comme une nouvelle poursuite pénale au sens strict, mais comme une exception encadrée visant à garantir la recherche de la vérité et l’équité. En sens inverse, l’interdiction de la double incrimination ne protège pas contre une révision légale, puisqu’il ne s’agit pas d’une seconde procédure mais d’une décision fondée sur de nouveaux faits concernant la même infraction.