Lexique juridique

GEAS

Définition et cadre juridique du GEAS

La définition GEAS désigne le « Système européen commun d’asile » (anglais : « Common European Asylum System », abrégé CEAS). Ce terme désigne le cadre juridique élaboré et continuellement réformé par l’Union européenne pour harmoniser la politique et les procédures d’asile de ses États membres. L’objectif du GEAS est de garantir une procédure d’asile uniforme, équitable et efficace au sein de l’UE et d’organiser efficacement la protection des réfugiés à l’échelle européenne.

Genèse et développement

Le GEAS a été mis en place progressivement depuis l’entrée en vigueur du Traité d’Amsterdam (1999) et notamment dans le cadre du « Programme de Stockholm ». La première phase d’élaboration a eu lieu entre 1999 et 2005, suivie d’une phase de réforme majeure à partir de 2013. Suite aux mouvements migratoires à partir de 2015, le système a été partiellement révisé et adapté en 2023 par une réforme d’ampleur (« Pacte sur l’asile et la migration »).

Sources juridiques et structure normative du GEAS

Le Système européen commun d’asile se compose de plusieurs actes juridiques directement applicables de l’Union européenne ainsi que de directives à transposer qui forment le cadre légal du droit d’asile dans tous les États membres de l’UE.

Directives et règlements

Les éléments centraux du GEAS sont :

Directive sur les procédures d’asile (2013/32/UE)

Cette directive fixe des normes communes pour la procédure d’octroi et de retrait de la protection internationale. Elle règle notamment le dépôt de la demande, le déroulement de la procédure, les voies de recours et les garanties procédurales pour les demandeurs de protection.

Directive sur les conditions d’accueil (2013/33/UE)

Elle contient des normes minimales concernant les conditions d’accueil des demandeurs d’asile, notamment en ce qui concerne l’hébergement, la prise en charge, la liberté de mouvement et l’accès au marché du travail.

Directive Qualifications (2011/95/UE)

Cette directive définit les formes de protection internationale (statut de réfugié et protection subsidiaire) et fixe les critères de leur octroi ainsi que les droits et obligations qui y sont liés.

Règlement Dublin III (Règlement (UE) n° 604/2013)

Ce règlement détermine quel État membre est responsable de l’examen d’une demande d’asile (dit « système de Dublin »). Il fixe les critères et mécanismes pour déterminer cette responsabilité.

Règlement Eurodac (Règlement (UE) n° 603/2013)

Eurodac établit une base de données centrale pour l’enregistrement et la comparaison des empreintes digitales des demandeurs d’asile et de certains ressortissants de pays tiers, afin de faciliter la détermination de la responsabilité conformément au règlement Dublin.

Autres actes juridiques pertinents

D’autres règlements et directives, tels que la directive relative à la protection temporaire (2001/55/CE) ou les actes juridiques nouvellement adoptés lors de la réforme GEAS 2023, complètent le système.

Structure et objectifs du GEAS

Le GEAS poursuit principalement trois objectifs centraux :

  1. Uniformisation des procédures d’asile dans les États membres ;
  2. Protection des droits fondamentaux des demandeurs d’asile et traitement équitable durant toute la procédure ;
  3. Prévention des migrations secondaires au sein de l’UE ainsi que réduction de l’attrait des procédures dites « d’asile à la carte ».

L’aménagement vise une répartition équilibrée des personnes en quête de protection ainsi qu’un traitement efficace des demandes d’asile.

Principes et fondements

Le GEAS repose sur la Convention de Genève relative au statut des réfugiés, la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), ainsi que sur les droits fondamentaux de la Charte des droits fondamentaux de l’UE, en particulier le principe de non-refoulement (interdiction d’expulser vers un pays où la vie ou l’intégrité physique seraient menacées). Le principe de reconnaissance mutuelle vise en outre à éviter que des personnes n’introduisent plusieurs demandes d’asile dans différents États (« demandes multiples d’asile »).

Réformes et actualités

Paquet de réformes 2023

Face aux défis posés par l’augmentation des flux migratoires, une réforme fondamentale a été adoptée en 2023. Les principales nouveautés concernent :

  • Introduction d’une procédure frontalière obligatoire aux frontières extérieures de l’UE ;
  • Refonte du mécanisme de solidarité entre les États membres (répartition, soutien financier, assistance opérationnelle) ;
  • Adaptations du système de Dublin pour une clarification plus rapide de la responsabilité ;
  • Normes améliorées concernant l’hébergement et la prise en charge des personnes en quête de protection.

Les réformes visent à créer une sécurité juridique, à soutenir les États membres et à assurer un standard minimal uniforme.

Critiques et défis

Le GEAS fait l’objet de débats politiques et sociétaux constants. Sont notamment critiqués :

  • Les différences pratiques dans la mise en œuvre des directives entre les États membres ;
  • La surcharge et les déséquilibres, principalement aux frontières extérieures de l’UE ;
  • Des inquiétudes sur les droits humains, par exemple concernant les procédures frontalières quasi-détenues et l’absence ou la limitation des voies de recours.

D’autres défis existent également en ce qui concerne l’application effective des normes minimales communes et le respect des droits des personnes en quête de protection.

Portée et effets juridiques du GEAS

Le GEAS constitue le cadre central du droit d’asile dans l’Union européenne. Il fixe des normes minimales contraignantes pour l’octroi de protection et la procédure, oblige les États membres à respecter des droits fondamentaux communs et règle la répartition interne des demandeurs d’asile. Les violations des règles fondamentales du GEAS peuvent donner lieu à des procédures devant la Cour de justice de l’Union européenne.

Rapports avec le droit national

Les directives et règlements couverts par le GEAS sont contraignants pour les États membres ; les règlements sont d’application directe, tandis que les directives doivent être transposées en droit national. Les dispositions d’asile nationales ne doivent pas contredire les normes minimales fixées par le GEAS.

Résumé

Das Système européen commun d’asile (GEAS) est un ensemble juridique complexe relevant du droit de l’Union, qui régit de manière exhaustive le domaine de l’asile au sein de l’Union européenne. Son objectif est l’harmonisation de la politique d’asile, la protection efficace des réfugiés ainsi qu’un traitement équitable et efficace des demandes d’asile dans tous les États membres. L’adaptation constante aux nouveaux défis fait du GEAS un domaine juridique dynamique à forte importance pratique et politique.

Questions fréquemment posées

Qui est responsable des procédures d’asile aux frontières extérieures selon le projet GEAS ?

La responsabilité de la mise en œuvre des procédures d’asile aux frontières extérieures de l’UE est, selon le « Pacte européen sur l’asile et la migration » (GEAS), transférée sous certaines conditions aux États membres par lesquels les demandeurs entrent pour la première fois dans l’UE. Selon le droit en vigueur et les projets actuels, ces États membres sont tenus de mener une procédure frontalière dans le cadre de laquelle l’admissibilité et le bien-fondé d’une demande d’asile doivent être examinés dans un délai court. Ces procédures doivent en particulier s’appliquer aux demandeurs en provenance de pays à faible taux de reconnaissance ou ayant pénétré sur le territoire en contournant les règles d’entrée existantes. La responsabilité juridique couvre toutes les étapes procédurales jusqu’à la décision, ainsi, le cas échéant, que l’organisation de l’hébergement ou du retour.

Quelles sont les normes minimales de procédure imposées par le GEAS pour les procédures frontalières ?

Le GEAS prévoit pour les procédures frontalières des normes minimales contraignantes, principalement fondées sur le droit d’asile européen et la Charte des droits fondamentaux de l’UE. Celles-ci incluent le droit d’accéder à une procédure d’asile individualisée, la possibilité d’être entendu par des autorités compétentes ainsi que l’accès aux services de traduction et de conseil juridique. Le GEAS oblige en outre les États membres à garantir des règles procédurales équitables, par exemple en assurant le droit d’être entendu, la protection des groupes particulièrement vulnérables et l’accès à un recours indépendant contre les décisions négatives dans un délai déterminé. L’élaboration de ces normes minimales reste du ressort du législateur national, mais doit néanmoins être conforme au droit de l’Union.

Quels sont les nouveaux mécanismes de solidarité et de répartition des charges prévus par le GEAS ?

Dans le cadre juridique du GEAS, un mécanisme de solidarité obligatoire est introduit, par lequel les États membres peuvent être tenus de participer à l’accueil des personnes protégées, de procéder à des retours ou d’apporter des contributions financières de solidarité. Ce mécanisme est activé notamment en cas de « pression migratoire » sur certains États membres et propose des options d’aide graduées, telles que la réinstallation, des mesures alternatives de solidarité et une aide technique et/ou financière. L’objectif est d’équilibrer juridiquement la répartition inégale des responsabilités au sein de l’UE et de remplacer progressivement le système de Dublin par une répartition plus équitable des charges.

Quelles sont les conséquences des nouvelles règles du GEAS sur la procédure de recours en matière d’asile ?

Le GEAS précise et harmonise les exigences relatives à la procédure de recours pour les demandeurs d’asile au niveau européen. Il contraint les États membres à mettre en place des recours effectifs contre les décisions d’asile rendues en première instance et à garantir l’effet suspensif des recours dans le cadre de la procédure frontalière, du moins lorsque l’éloignement est en jeu. Il précise par ailleurs que les litiges en matière d’asile doivent être traités dans certains délais afin d’assurer la sécurité juridique procédurale. Les États membres doivent par ailleurs prévoir des garanties d’information et de procédure pour assurer l’accès à une protection judiciaire.

Comment le GEAS règle-t-il le traitement des demandes d’asile dites « manifestement infondées » ?

Le GEAS prévoit, pour les demandes d’asile « manifestement infondées », des procédures accélérées spécifiques, dans lesquelles l’examen se fait selon une procédure frontalière accélérée. Cela concerne notamment les demandeurs provenant de « pays d’origine sûrs », la procédure prévoyant des délais stricts pour la décision finale et un éventuel retour. Toutefois, des garanties minimales d’état de droit s’appliquent également ici, notamment le droit à un examen individuel, l’accès à une assistance juridique et des voies de recours effectives. La qualification de « manifestement infondée » doit toujours être appréciée au cas par cas et conformément aux exigences du droit de l’Union et du droit international.

Quelle est la signification du concept d’« État tiers sûr » dans le contexte du GEAS ?

Dans le cadre juridique du GEAS, le concept d’« État tiers sûr » revêt une importance particulière. Une demande d’asile peut être déclarée irrecevable lorsqu’un lien suffisant existe entre le demandeur et un État tiers considéré comme sûr au sens des standards européens en matière d’asile. L’État membre doit alors engager une procédure appropriée et garantir que les retours ne soient effectués que si les garanties de protection internationale (telle la Convention de Genève et la CEDH) sont respectées dans l’État tiers. L’application pratique du concept exige en outre des examens individualisés spécifiques et des mécanismes de recours efficaces contre une telle qualification.

Dans quelle mesure le GEAS concerne-t-il les groupes vulnérables tels que les mineurs ou les personnes particulièrement en besoin de protection ?

Le GEAS oblige expressément les États membres à mettre en place des mécanismes de protection spécifiques pour les groupes vulnérables, en particulier les mineurs non accompagnés, les victimes de traite des êtres humains, les personnes traumatisées et celles ayant des besoins médicaux spécifiques. Sur le plan juridique, un examen individuel de la vulnérabilité doit être effectué dans chaque cas. Pour les mineurs, il est prévu qu’aucune procédure frontalière ne puisse en principe avoir lieu et que l’hébergement soit assuré dans des structures appropriées et adaptées aux enfants. Tout au long de la procédure d’asile s’appliquent également des garanties procédurales renforcées, telles que l’accès à des mesures de soutien adaptées, des mesures de protection contre la détention et la participation de tuteurs ou de représentants qualifiés.