Droit pénal axé sur la personne : notion, importance et distinctions
Le droit pénal axé sur la personne (« Täterstrafrecht ») constitue un concept central dans le système pénal allemand. Il désigne une approche fondamentale de la détermination de la peine et de la théorie du crime, où l’accent est mis sur la personne de l’auteur de l’infraction. Cette approche se distingue en particulier du droit pénal axé sur l’acte (« Tatstrafrecht »), qui met principalement l’accent sur l’acte illicite commis. Comprendre le droit pénal axé sur la personne est d’une grande importance, tant pour le droit pénal matériel que pour de nombreuses questions de procédure pénale.
Évolution historique du droit pénal axé sur la personne
Origines et courants de développement
Le droit pénal axé sur la personne trouve ses origines principalement au XIXe et début du XXe siècle dans l’histoire du droit pénal allemand. D’éminents pénalistes, tels que Franz von Liszt et les représentants de l’école dite de la sociologie criminelle, ont largement contribué à l’élaboration de ce concept.
Alors que le droit pénal classique axé sur l’acte se concentre exclusivement sur le comportement punissable et ses conséquences, le droit pénal axé sur la personne part du principe que la personnalité individuelle, le caractère, les conditions de vie ainsi que la dangerosité de l’auteur pour la société doivent également être pris en compte dans la détermination de la culpabilité et de la peine. Le développement du droit pénal axé sur la personne est ainsi étroitement lié aux mouvements de réforme qui réclamaient une prise en compte accrue des facteurs sociaux et psychologiques dans le droit pénal.
Définitions et cadre systématique
Définition du droit pénal axé sur la personne
Le droit pénal axé sur la personne est une approche pénale selon laquelle la détermination du montant et de la nature de la sanction se fonde sur les caractéristiques personnelles, les qualités et la dangerosité de la personne poursuivie. Le droit pénal axé sur la personne se concentre sur la question de savoir quelles conséquences juridiques découlent de la personnalité, des antécédents, du pronostic social et des motivations individuelles de l’auteur.
Distinction avec le droit pénal axé sur l’acte
À l’inverse, le droit pénal axé sur l’acte met en avant l’infraction concrète et son caractère illicite. Les critères déterminants pour la sanction sont ici la réalisation de l’élément légal de l’infraction, la culpabilité et l’illicéité de l’acte, tandis que les circonstances personnelles de l’auteur ne sont prises en compte qu’au stade de la détermination de la peine (cf. § 46 StGB).
La distinction entre droit pénal axé sur la personne et droit pénal axé sur l’acte revêt une grande importance pratique et doctrinale, car elle reflète des philosophies différentes quant à l’objectif et à la fonction de la peine.
Fondements juridiques et champs d’application
Droit pénal axé sur la personne dans le Code pénal
Le droit pénal allemand combine des éléments des deux approches. Il poursuit ainsi une combinaison entre la relation à l’acte et la personnalisation de la peine. L’article central est le § 46 du Code pénal allemand (StGB), qui énumère la culpabilité de l’auteur ainsi que ses motivations, buts et conditions de vie parmi les facteurs déterminants pour la peine.
Normes pertinentes
- § 46 StGB: La prise en compte des motivations, des objectifs et d’autres circonstances tenant à la personnalité de l’auteur.
- § 56 StGB (Sursis à l’exécution de la peine): Le pronostic social du condamné joue un rôle déterminant.
- § 63 StGB (Placement en hôpital psychiatrique) und § 66 StGB (Rétention de sûreté): L’ordonnance de mesures privatives de liberté en raison de la dangerosité de l’auteur.
Droit pénal axé sur la personne et détermination de la peine
En plus du cadre légal, la personnalité de l’auteur est souvent prise en compte lors de la fixation de la peine comme facteur atténuant ou aggravant. Par exemple, les antécédents judiciaires, les déficits de développement, le repentir, la capacité de remise en question ou des facteurs de charge particuliers sont pris en considération.
Aspects dogmatiques et critique
Débat doctrinal
L’intégration de la personnalité de l’auteur dans l’évaluation pénale fait l’objet d’un débat controversé dans la doctrine allemande. Les partisans soulignent la nécessaire individualisation de la peine et l’approche préventive favorisant la prévention de la récidive et la réinsertion. Les voix critiques, quant à elles, mettent en garde contre une évaluation injustifiée et, dans certains cas, discriminatoire de la personnalité ou de l’origine, et réclament une orientation plus rigoureuse sur les faits objectifs.
Incidences en procédure pénale
Des éléments du droit pénal axé sur la personne se retrouvent également en procédure pénale, notamment dans l’expertise psychiatrique et psychologique, l’obtention de pronostics sociaux ou l’application de mesures de réinsertion et de sécurité.
Droit pénal axé sur la personne et mesures de réadaptation et de sûreté
Un domaine d’application marquant du droit pénal axé sur la personne est constitué par les mesures de réadaptation et de sûreté. Celles-ci ne sont pas principalement orientées à l’occasion d’une infraction concrète, mais en fonction de la dangerosité de l’auteur et de son évolution future :
- Placement psychiatrique (§ 63 StGB)
- Rétention de sûreté (§ 66 StGB)
- Surveillance de la conduite (§ 68 StGB)
Le prononcé d’une telle mesure repose sur le pronostic individuel de l’auteur et vise à protéger le public.
Droit pénal axé sur la personne en comparaison internationale
Au niveau international, l’importance respective du droit pénal axé sur l’acte et sur la personne varie. Alors que le droit pénal allemand présente une forme mixte, les systèmes anglo-américains s’orientent souvent davantage vers le droit pénal axé sur l’acte, tout en tenant également compte de la personne de l’auteur lors de la fixation de la peine.
Importance en criminologie et en philosophie du droit
D’un point de vue criminologique, le droit pénal axé sur la personne met en avant l’interaction entre l’individu et la société. Il reflète l’idée que la criminalité n’est pas seulement le résultat d’un acte isolé, mais l’expression de dispositions sociales, psychiques et biologiques.
Dans le débat de philosophie du droit, le droit pénal axé sur la personne intervient en particulier dans la légitimation des mesures de prévention et de sûreté, soulevant ainsi des questions de justice individuelle et de monopole punitif de l’État.
Conclusion
Le droit pénal axé sur la personne représente une approche fondamentale en droit pénal allemand, qui permet l’individualisation de la peine par la prise en compte des caractéristiques personnelles et des éléments de dangerosité de l’auteur. Sa mise en œuvre se manifeste principalement lors de la fixation de la peine et dans le prononcé de mesures particulières. Le débat permanent sur la relation entre droit pénal axé sur la personne et celui axé sur l’acte structure de manière significative la discussion juridique et criminologique en Allemagne et à l’international.
Questions fréquemment posées
Quand y a-t-il tentative selon le droit pénal axé sur la personne ?
Une tentative, au sens du droit pénal axé sur la personne, existe lorsque l’auteur, selon sa conception de l’infraction, commence immédiatement à réaliser les éléments objectifs de l’infraction sans que le résultat légal ne soit encore survenu. Le critère déterminant est ici le § 22 StGB. On considère qu’il y a commencement immédiat lorsque l’auteur entreprend des actes qui, selon sa propre perception, doivent directement aboutir à la réalisation de l’infraction. Dès le stade de la tentative, le comportement de l’auteur peut être répréhensible, à condition que l’infraction soit « susceptible de tentative », ce qui concerne notamment les délits passibles d’une peine minimale supérieure à un an. Des éléments subjectifs sont également requis, tels que l’intention – soit la volonté de réaliser tous les éléments de l’infraction. La tentative est punie moins sévèrement que l’infraction consommée (§ 23 II StGB) et le retrait conformément au § 24 StGB permet à l’auteur d’échapper à la peine sous certaines conditions.
Quelle est la différence entre co-auteur et auteur dans le droit pénal axé sur la personne ?
En droit pénal axé sur la personne, on distingue clairement la co-action (« Mittäterschaft ») et l’action individuelle. Selon le § 25 II StGB, il y a co-action lorsque plusieurs acteurs participent ensemble à la réalisation de l’infraction – la collaboration consciente basée sur un plan d’action commun (appelée commission collective) est déterminante. Chaque co-auteur est sanctionné comme un auteur, indépendamment du fait qu’il remplisse personnellement tous les éléments de l’infraction ou qu’il se limite à des actes préparatoires tels que la planification ou la surveillance, dès lors que ceux-ci sont constitutifs et contributifs à l’acte. À l’inverse, l’auteur individuel réalise l’infraction seul et doit satisfaire personnellement à toutes les conditions légales. L’attribution des actes et l’évaluation de la responsabilité individuelle sont également régies par les distinctions propres au droit pénal axé sur la personne.
Quelle est l’importance de l’intention dans le droit pénal axé sur la personne ?
L’intention (« Vorsatz ») est un élément central du droit pénal axé sur la personne ; sans elle, la responsabilité pénale fait en principe défaut, sauf si la répression de la négligence est prévue par la loi. On distingue trois formes d’intention : dessein (dolus directus de premier degré), intention directe (dolus directus de second degré) et éventualité (dolus eventualis). Il est requis que l’auteur ait connaissance de tous les éléments de l’infraction et la commette en connaissance de cause et de volonté. En l’absence d’intention, par exemple en cas d’erreur de droit inévitable (§ 17 StGB), la responsabilité pénale en tant qu’infraction intentionnelle disparaît. La forme de l’intention peut influencer de manière notable la fixation de la peine, un acte commis avec dessein traduisant une culpabilité plus élevée qu’un acte avec dolus eventualis.
Dans quelles conditions un retrait de la tentative est-il exonératoire ?
Un retrait exonératoire est possible conformément au § 24 StGB, lorsque, après le début de l’exécution, l’auteur abandonne volontairement et de sa propre initiative la poursuite de l’infraction ou en empêche l’aboutissement. La condition déterminante pour l’exonération est la spontanéité : le comportement doit être motivé de façon autonome, sans contrainte extérieure, par exemple à la suite d’une remise en question morale ou d’un repentir. Le retrait reste possible après une tentative manquée, à condition que l’auteur renonce définitivement à poursuivre l’infraction et contribue à empêcher le résultat. Il n’y a pas d’exonération si le résultat ne se réalise pas indépendamment du comportement de l’auteur ou si l’abandon est motivé par la crainte de la découverte.
Quel rôle joue le principe de culpabilité dans le droit pénal axé sur la personne ?
Le principe de culpabilité est fondamental en droit pénal axé sur la personne et signifie qu’une sanction ne peut être prononcée que si un comportement personnellement répréhensible – donc une faute – peut être reproché à l’auteur. La culpabilité suppose la capacité de discernement de l’auteur (par exemple, l’absence de certaines causes d’exclusion comme l’irresponsabilité selon le § 20 StGB) ainsi que l’exigibilité individuelle de son comportement. Les erreurs, l’erreur sur l’illicéité (§ 17 StGB) ou des maladies médicalement constatées excluant la conscience de l’injustice ou la capacité de contrôle, interrompent ou atténuent la culpabilité, conduisant à l’exonération ou à une atténuation de la peine (§ 21 StGB). De plus, le principe de culpabilité limite le pouvoir punitif de l’État et est étroitement lié au principe constitutionnel de proportionnalité.
Quel rôle jouent les erreurs sur les éléments constitutifs et sur l’illicéité en droit pénal axé sur la personne ?
L’erreur sur les éléments constitutifs de l’infraction (§ 16 StGB) existe lorsque l’auteur ignore, au moment de l’acte, une circonstance entrant dans la définition légale de l’infraction. Une telle erreur exclut l’intention et fait que l’acte n’est pas punissable, sauf si une commission par négligence est prévue. À l’inverse, l’erreur sur l’illicéité (§ 17 StGB) concerne l’ignorance du caractère prohibé ou injuste d’un acte. Si l’erreur était inévitable, la culpabilité disparaît et la punissabilité est exclue ; si l’erreur était évitable, une atténuation de la peine est possible. Ces deux types d’erreur sont étroitement liés aux principes d’exclusion de culpabilité et d’illicéité et servent à protéger les personnes agissant dans l’ignorance ou l’erreur d’appréciation.
Que signifient auteurs et participants et comment les distingue-t-on ?
En droit pénal axé sur la personne, une stricte distinction est opérée entre auteur et participant : l’auteur est celui qui réalise immédiatement les éléments de l’infraction, alors que le participant (instigateur, complice) contribue à l’infraction commise par un autre (§§ 26, 27 StGB). La différenciation s’effectue selon le critère de la participation déterminante (« théorie de la maîtrise de l’acte ») : celui qui détient la maîtrise des faits est auteur, celui qui ne fait que favoriser ou provoquer l’acte d’autrui est participant. Les auteurs sont généralement plus sévèrement sanctionnés que les participants, avec également des menaces de peine et des restrictions spécifiques en matière d’instigation et de complicité. Cette distinction est capitale pour la fixation de la peine, l’imputation des contributions individuelles aux faits et la répression de la tentative.