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Détention préventive

Définition et cadre juridique de la détention préventive (Schutzhaft)

La Schutzhaft est un terme du droit pénal et du droit administratif désignant la détention de personnes sans procédure judiciaire régulière ou sans ordonnance judiciaire formelle. Cette mesure vise principalement à prévenir des dangers pour la sécurité et l’ordre publics, ainsi qu’à protéger la collectivité ou certaines personnes. La Schutzhaft se distingue, tant sur le fond que sur le plan juridique, d’autres formes de privation de liberté, telles que les peines privatives de liberté prononcées après un jugement pénal, la détention provisoire ou la rétention de sûreté.

Évolution historique de la Schutzhaft

Origines au XIXe et au début du XXe siècle

La Schutzhaft s’est développée, au fil du XIXe et du début du XXe siècle, dans divers États comme un moyen pour l’exécutif d’agir de façon flexible contre des dangers réels ou supposés pour l’État ou la sécurité publique. Elle était initialement prévue comme une mesure exceptionnelle lors de situations de crise, par exemple en cas de menace de guerre, d’insurrections menaçant l’État ou de pandémies.

La Schutzhaft sous le national-socialisme

Avec l’avènement de l’époque du national-socialisme en Allemagne, la Schutzhaft revêt une importance centrale, mettant en danger l’État de droit. Le régime national-socialiste a systématiquement utilisé la Schutzhaft comme instrument de répression politique : d’innombrables opposants au régime, dissidents, membres de minorités discriminées ainsi que des groupes religieux ont été placés en « Schutzhaft », souvent sans audition légale, sans accusation ni décision de justice. La Schutzhaft est ainsi devenue la base des détentions de masse dans les camps de concentration et a largement contribué à l’établissement d’un État policier répressif. Les fondements juridiques ont été établis par les ordonnances nazies, en particulier le décret du Président du Reich pour la protection du peuple et de l’État de 1933 (la « Reichstagsbrandverordnung »), qui suspendait des droits fondamentaux essentiels.

Après-guerre et traitement juridique

Après la fin de la Seconde Guerre mondiale et de la dictature nationale-socialiste, la Schutzhaft a été totalement délégitimée en tant que mesure extralégale dans sa forme d’alors. Le nouvel ordre juridique allemand, notamment la Loi fondamentale (Grundgesetz), exclut toute intervention sans contrôle judiciaire et sans base légale suffisante.

La Schutzhaft dans le droit actuel

Fondements juridiques

Aujourd’hui, il n’existe plus en Allemagne de Schutzhaft au sens qu’elle avait sous le national-socialisme. Les restrictions à la liberté individuelle ne peuvent être ordonnées que sur la base d’une loi et dans le respect des prescriptions de la Loi fondamentale. Les dispositions essentielles résultent notamment de :

  • Loi fondamentale pour la République fédérale d’Allemagne (GG), en particulier l’art. 2 al. 2 phrase 2 GG (droit à la liberté) et l’art. 104 GG (privation de liberté)
  • Lois sur la police et la sécurité des Länder
  • Code de procédure pénale (StPO) (dans le cadre des poursuites pénales, mais pas en tant que Schutzhaft)

Distinction par rapport aux autres formes de privation de liberté

Le droit actuel connaît différentes formes de privation de liberté, qui se distinguent tant par leur objectif que par leurs conditions juridiques de la Schutzhaft historique. Cela comprend notamment :

Placement en garde à vue par la police

Conformément aux lois sur la police et l’ordre public des Länder, la garde à vue policière est admise pour prévenir des dangers. Toutefois, elle nécessite une ordonnance et un contrôle judiciaire ainsi qu’une limitation dans le temps. Elle sert, par exemple, à protéger contre un danger pour soi-même ou autrui, à garantir une procédure ou à prévenir des infractions pénales.

Placement et rétention de sûreté

Les mesures judiciaires de sûreté contre des personnes pour la protection de la collectivité ne sont possibles que dans des conditions matérielles et constitutionnelles très strictes, par exemple par un placement provisoire selon les lois sur les personnes souffrant de troubles psychiques ou par la rétention de sûreté dans le cadre de l’exécution d’une peine.

Exigences constitutionnelles

L’ordonnance actuelle de toute privation de liberté est soumise à des conditions strictes :

  • Principe de légalité et de précision : Toute atteinte à la liberté individuelle doit reposer sur une base légale précise et claire.
  • Ordonnance judiciaire : Conformément à l’art. 104 GG, toute privation de liberté doit en principe être ordonnée par un juge, à moins qu’une décision judiciaire ne puisse être obtenue au préalable.
  • Droit d’être entendu : Les personnes concernées doivent être entendues avant toute mesure de privation de liberté.
  • Contrôle immédiat : Les personnes détenues ont le droit à un contrôle immédiat de la mesure par un tribunal.
  • Limitation dans le temps : La privation de liberté doit être limitée dans le temps et faire l’objet d’un réexamen régulier.

La Schutzhaft en droit international

Au niveau international également, la Schutzhaft fait l’objet de discussions et d’analyses. La Convention européenne des droits de l’homme (CEDH) et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) prévoient des exigences détaillées en matière de privation de liberté. Selon l’art. 5 CEDH, la liberté individuelle ne peut être restreinte que dans les cas exceptionnels prévus par la loi, sur ordonnance d’un juge et dans le respect des garanties légales. La détention arbitraire ou sans motif valable est interdite.

La Schutzhaft dans le contexte policier

Mesures préventives de sûreté

Le terme de « Schutzhaft » est parfois encore employé, dans le langage courant, pour désigner les gardes à vue policières, notamment lors de grands événements ou de manifestations, par exemple pour la « protection » des participants ou la prévention de dangers. Cependant, de telles mesures sont soumises aux prescriptions légales précitées et sont, du point de vue juridique, qualifiées de garde à vue ou de placement administratif par la police.

Gestion des personnes à risques

Dans un contexte de menace terroriste ou de situations dangereuses graves, les autorités de sécurité sont soumises à une pression particulière pour agir. Néanmoins, toute privation de liberté doit respecter strictement les prescriptions légales. La « détention préventive » n’est en Allemagne autorisée que dans les conditions très strictes du droit policier et administratif, avec l’intervention d’un juge et des délais rigoureux, par exemple pour empêcher la commission imminente d’infractions graves.

Résumé et appréciation juridique

La Schutzhaft, dans sa forme historique, était un instrument de privation de liberté sans protection juridique effective, qui a été notamment détourné de son but sous les dictatures du XXe siècle. Dans l’ordre juridique allemand et européen actuel, elle est délégitimée comme mesure contraire aux droits fondamentaux. Toute forme de privation de liberté nécessite aujourd’hui une protection considérable de l’État de droit et un contrôle judiciaire. Le terme Schutzhaft n’est plus reconnu juridiquement, à proprement parler, comme une catégorie propre de privation de liberté ; les gardes à vue policières ou mesures préventives sont strictement encadrées par la loi, limitées au cas d’espèce et à tout moment soumises au contrôle des tribunaux.

L’analyse juridique du terme Schutzhaft met en évidence l’importance de la protection constitutionnelle de la liberté individuelle et la nécessité de limiter et de rendre transparents les interventions de l’État.

Questions fréquemment posées

Comment la Schutzhaft est-elle ordonnée juridiquement ?

En Allemagne, la Schutzhaft est essentiellement ordonnée par une autorité d’État disposant d’une base légale appropriée, par exemple par la police ou le parquet dans le cadre de leur compétence en matière de prévention des dangers et de poursuites pénales. Le fondement principal est ici le droit policier des Länder ou, en cas de danger terroriste, le droit fédéral. Une ordonnance n’est généralement admise que s’il existe un danger aigu pour la sécurité et l’ordre publics et s’il n’est pas possible de prévenir ce danger par des moyens moins intrusifs. La Schutzhaft ne peut être ordonnée qu’aux strictes conditions des lois applicables et dans le respect du principe de légalité. Elle est dans tous les cas limitée dans le temps et doit faire l’objet d’un contrôle régulier par un juge afin d’exclure tout abus de cette mesure.

Quels sont les droits d’une personne placée en Schutzhaft ?

Les personnes placées en Schutzhaft bénéficient en droit allemand de nombreux droits visant à protéger leur personnalité et à garantir les principes de l’État de droit. Les principaux droits sont : le droit d’être entendu, le droit d’informer une personne de confiance ou un avocat, ainsi que le droit à un contrôle judiciaire de la détention. Les conditions de détention doivent être humaines et conformes aux standards de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH). De plus, la personne détenue a le droit de communiquer avec l’extérieur, notamment en cas de Schutzhaft prolongée, et le droit de former des recours contre la mesure, par exemple via une plainte ou une demande de contrôle de la détention. Le principe de proportionnalité doit être strictement respecté.

Dans quelles conditions la Schutzhaft prend-elle fin ?

La Schutzhaft ne peut être maintenue que tant que la condition de danger aigu subsiste et qu’aucune alternative moins restrictive n’est disponible. Si le danger cesse ou si un changement rend la Schutzhaft disproportionnée, la privation de liberté doit être immédiatement levée. Par ailleurs, il existe des limites automatiques dans le temps, à l’expiration desquelles un réexamen judiciaire doit avoir lieu ou la détention doit prendre fin. En tout état de cause, la Schutzhaft prend fin dès lors qu’un tribunal juge sa prolongation illicite, qu’un contrôle judiciaire remet en cause ses fondements ou qu’un recours aboutit.

Quelle est la différence entre Schutzhaft et détention provisoire ?

La Schutzhaft et la détention provisoire diffèrent sur le plan juridique tant par leur finalité que par leurs conditions et procédures d’ordonnance. La Schutzhaft vise principalement la prévention des dangers et est de nature préventive. Sa base juridique se trouve dans le droit policier et administratif. À l’inverse, la détention provisoire est une mesure contraignante prévue dans le Code de procédure pénale, qui n’est ordonnée qu’en présence de certains motifs, tels que le risque de fuite ou de dissimulation, afin de garantir le déroulement d’une procédure pénale. Alors que la détention provisoire ne peut être ordonnée que par un tribunal, la Schutzhaft peut, dans un premier temps, être ordonnée par la police ou l’administration, mais requiert rapidement un contrôle judiciaire. La durée et les conditions de détention diffèrent également, bien que des mécanismes stricts de contrôle de l’État de droit s’appliquent aux deux.

Quelles sont les mesures de contrôle et de vérification prévues pour l’ordonnance de Schutzhaft ?

La Schutzhaft est soumise à de nombreux mécanismes de contrôle pour protéger les droits fondamentaux de la personne concernée et garantir le principe de proportionnalité. En règle générale, la mesure doit être soumise à un juge pour réexamen dans un délai bref, généralement 24 ou 48 heures. Le juge décide alors du maintien, de la modification ou de la levée de la mesure. Des contrôles réguliers sont également prévus ; la police ou l’administration doit justifier la nécessité continue de la détention. Les personnes concernées ont le droit d’introduire à tout moment des recours, tels que des plaintes ou des demandes de contrôle judiciaire contre la Schutzhaft. Enfin, la Schutzhaft fait l’objet d’un contrôle a posteriori des tribunaux, notamment dans le cadre de procédures en responsabilité de l’État ou en indemnisation.

Existe-t-il des règles légales spécifiques concernant la Schutzhaft en droit allemand ?

Le droit allemand ne comporte pas de réglementation générale et uniforme de la Schutzhaft à l’échelle fédérale ; les bases légales se trouvent principalement dans les diverses lois policières des Länder ainsi que, à titre complémentaire, dans des dispositions spéciales, par exemple en cas de menace terroriste. La Loi fondamentale et la Convention européenne des droits de l’homme fixent les cadres essentiels, notamment en ce qui concerne le droit fondamental à la liberté individuelle (art. 2 al. 2 GG) et le droit à une protection juridique effective (art. 19 al. 4 GG). Il convient par ailleurs de respecter les principes du droit administratif général et les règles de procédure judiciaires applicables.

Quels recours sont ouverts contre l’ordonnance de Schutzhaft ?

Une personne placée en Schutzhaft dispose de différents recours pour contester la privation de liberté. Les principaux sont : la plainte conformément aux dispositions du droit des Länder concerné, ainsi que des demandes de décision du tribunal compétent (par exemple un contrôle de la détention selon § 23 EGGVG – Loi sur la juridiction gracieuse). Les personnes concernées peuvent également solliciter une protection juridique provisoire ou former un recours constitutionnel, notamment si elles invoquent une violation de leurs droits fondamentaux. En cas d’ordonnance ou d’exécution illégale de la Schutzhaft, une indemnisation peut être demandée en application de la loi sur l’indemnisation en matière de poursuites pénales (StrEG), dans la mesure où la Schutzhaft est liée à une procédure pénale.