Notion et définition de l’infraction putative
L’infraction putative est un concept de droit pénal qui décrit une situation particulière dans laquelle une personne croit à tort commettre une infraction alors que le comportement qu’elle redoute n’est en réalité pas punissable. Ce qui caractérise l’infraction putative, c’est la croyance en une infraction qui n’existe que dans l’imagination de l’auteur — il s’agit donc d’une erreur sur l’interdiction en l’absence de norme d’interdiction. L’infraction putative se distingue tant de la tentative inapte que d’autres types d’erreur et joue un rôle important dans l’analyse des éléments subjectifs de l’infraction.
Classement systématique et distinction
L’infraction putative est étroitement liée à plusieurs formes d’erreurs en droit pénal. Une différenciation claire est nécessaire pour comprendre ses conséquences juridiques spécifiques et son traitement en doctrine pénale.
Distinction par rapport à la tentative inapte
Contrairement à l’infraction putative, la tentative inapte suppose une infraction objectivement existante qui, cependant, ne peut aboutir en raison de circonstances inconnues de l’auteur (par exemple lorsque l’on tire sur une personne censée être vivante mais qui est en réalité décédée). Dans l’infraction putative, il manque déjà la base légale de l’infraction ; le comportement n’est pas punissable, même si toutes les représentations de l’auteur étaient conformes à la réalité.
Distinction par rapport au délit putatif
La notion de délit putatif (du latin « putare » = croire, penser) est souvent utilisée en droit pénal allemand comme synonyme d’infraction putative. Toutefois, une différenciation terminologique existe parfois : alors que l’infraction putative englobe la fausse supposition d’un acte punissable dans un comportement en réalité licite, le délit putatif fait généralement référence à l’erreur consistant à croire commettre une infraction tout court.
Distinction par rapport à l’erreur sur l’élément constitutif et à l’erreur sur l’interdiction
Il convient également de distinguer l’infraction putative de l’erreur sur l’élément constitutif (erreur sur des circonstances de fait requises par la loi pénale) et de l’erreur sur l’interdiction (mauvaise appréciation concernant l’existence ou la portée d’une norme d’interdiction). Une infraction putative est présente dès lors que l’on se trompe sur l’existence même d’une interdiction légale.
Conditions et formes de manifestation de l’infraction putative
Est caractéristique de l’infraction putative la situation où :
- le comportement de l’auteur n’entre pas dans le champ d’une infraction pénale,
- mais où l’auteur pense cependant commettre une infraction,
- c’est-à-dire que l’élément subjectif (intention) est parfaitement constitué alors que l’élément objectif fait totalement défaut.
Un exemple typique est le « vol putatif » : celui qui, pensant s’approprier un bien appartenant à autrui, s’empare d’un objet sans maître, agit subjectivement avec l’intention de voler, mais l’élément de l’appartenance à autrui manque objectivement et donc la punissabilité également.
Conséquences juridiques de l’infraction putative
Puisque dans le cas de l’infraction putative l’illicéité fait déjà défaut sur le plan objectif, aucune sanction n’est envisageable. Le droit pénal conditionne la punissabilité à la réalisation d’un élément légal de l’infraction (principe d’interdiction de l’analogie conformément à l’article 103 al. 2 de la Loi fondamentale). Dès lors que cet élément fait défaut, le comportement demeure impuni, même si l’auteur pensait agir de manière punissable.
Infraction putative en lien avec la punissabilité des actes préparatoires
La question se pose de savoir si, dans des cas d’infraction putative, des actes préparatoires pourraient être punissables, notamment au titre de dispositions subsidiaires (par ex. § 241 StGB – Menaces). Ici aussi s’applique le principe selon lequel la punissabilité dépend de l’existence d’une règle applicable. Si une personne prépare une « infraction » qui, en réalité, n’est pas prévue par la loi pénale, il s’agit également d’une infraction putative, sans possibilité de sanction.
Infraction putative dans la partie spéciale du droit pénal
Dans la partie spéciale du droit pénal, l’infraction putative est concevable dans une grande diversité de groupes d’infractions. Elle est particulièrement discutée pour les infractions contre la propriété et le patrimoine, mais aussi pour les infractions sexuelles ou en matière de stupéfiants, par exemple lorsque l’imagination de l’auteur ne correspond pas aux véritables conditions légales de l’infraction.
Exemples tirés de la jurisprudence
La jurisprudence a évoqué l’infraction putative dans diverses configurations, notamment :
- L’appropriation de choses sans maître dans la croyance d’un vol,
- la prétendue falsification de documents sur des papiers « vierges »,
- des infractions supposées aux stupéfiants impliquant des substances légales ou inoffensives.
Infraction putative et procédure pénale
En procédure pénale, l’infraction putative n’a pas de pertinence directe, car il ne peut y avoir condamnation dès l’origine. Une enquête peut cependant être ouverte si les autorités présument d’abord une infraction, avant de constater qu’il n’y a objectivement pas de punissabilité.
Littérature et indications complémentaires
L’infraction putative fait régulièrement l’objet de développements dans les manuels de droit pénal général ainsi que dans les commentaires systématiques. On la retrouve notamment en sous-chapitre dans les parties consacrées à l’intention, à la décision de commettre l’infraction, ainsi qu’à la tentative et à l’erreur en droit pénal.
Résumé : L’infraction putative désigne en droit pénal le cas où une personne a l’intention de commettre une infraction, mais réalise en réalité un comportement non punissable. Elle se caractérise par l’absence totale de l’élément objectif de l’infraction alors que l’intention subjective est pleinement présente. L’infraction putative doit être distinguée de la tentative inapte, de l’erreur sur l’élément constitutif et de l’erreur sur l’interdiction, et demeure toujours impunie. Elle illustre le principe de légalité et l’interdiction de l’analogie en droit pénal ainsi que l’exigence que la punissabilité soit subordonnée à des conditions expresses prévues par la loi.
Questions fréquemment posées
Quelles conditions juridiques doivent être réunies pour retenir une infraction putative ?
L’infraction putative suppose que l’auteur présume à tort (par erreur) l’existence d’une interdiction ou d’une obligation qui en réalité n’existe pas ou n’a pas cette portée, et croit ainsi violer une norme pénale par son comportement. Sur le plan juridique, il est essentiel qu’il n’y ait objectivement aucun acte répréhensible, car l’infraction admise par l’auteur n’existe pas en droit ou parce que les faits concernés ne sont pas punissables. L’erreur de l’auteur porte exclusivement sur l’existence même de la punissabilité : il suppose commettre une infraction alors que son comportement n’est pas constitutif de l’infraction. Une condition centrale est également qu’aucun acte répréhensible n’existe, ni factuellement ni juridiquement (aucune conformité des faits aux conditions légales). Il ne s’agit donc pas d’une tromperie volontaire sur des normes pénales existantes, mais bien d’une erreur injustifiée sur la punissabilité.
Une infraction putative peut-elle être poursuivie pénalement ?
Une infraction putative n’est fondamentalement pas punissable, car le comportement ne relève objectivement pas du champ d’application de la loi pénale. En droit pénal allemand, le principe d’interdiction de l’analogie et l’exigence de légalité s’appliquent, de sorte que seules les actions ou omissions explicitement visées par la loi peuvent être sanctionnées. En l’absence de réalisation objective des éléments constitutifs, il manque une base légale, et l’infraction putative ne peut donc conduire à une condamnation. Cela vaut même si l’auteur agit dans l’illusion d’enfreindre la loi – ce qui compte, c’est l’absence objective de toute infraction.
Quelles sont les conséquences d’une infraction putative sur la tentative d’infraction ?
Dans le contexte de la tentative d’infraction, l’infraction putative doit être examinée avec attention, car la tentative selon l’article 22 StGB suppose que l’auteur commence immédiatement, selon sa représentation, la réalisation de l’infraction. Or, dans l’infraction putative, c’est précisément l’élément objectif de la loi qui fait défaut, et conformément à l’opinion majoritaire en droit pénal, il n’existe pas de « tentative inapte » à propos d’un fait qui ne constitue pas une infraction. Si un comportement ne relève objectivement pas d’une infraction, toute responsabilité pénale pour tentative est également exclue, faute de « délit » au sens du code pénal. Ainsi, la violation intentionnelle d’une prétendue interdiction ne fonde pas la punissabilité à titre de tentative.
Quelle est la portée de l’infraction putative dans l’examen d’une erreur sur l’interdiction ?
L’infraction putative se distingue strictement de l’erreur sur l’interdiction au sens de l’article 17 StGB. Il y a erreur sur l’interdiction lorsque l’auteur ne réalise pas l’illégalité de son acte, alors que le comportement est objectivement punissable. L’infraction putative inverse la situation : l’auteur suppose à tort qu’un comportement est interdit alors qu’il est objectivement autorisé. Dès lors, dans le cas de l’infraction putative, il n’y a pas lieu d’examiner l’erreur sur l’interdiction, car l’élément de l’infraction fait déjà défaut objectivement et la protection des biens juridiques n’est pas concernée. Toute sanction fondée sur une erreur sur l’interdiction est exclue dans l’infraction putative, car il n’existe pas d’illicéité susceptible d’être sanctionnée par l’ordre juridique.
Quand une infraction putative peut-elle se transformer en une autre infraction ?
Une infraction putative peut devenir pertinente sur le plan pénal lorsque le comportement effectivement réalisé, indépendamment de l’erreur, remplit les éléments constitutifs d’une autre infraction. Si l’erreur sur la punissabilité conduit l’auteur à commettre objectivement une autre infraction, il doit être sanctionné pour l’infraction réellement réalisée. Exemple : une personne croit à tort que tirer des feux d’artifice est interdit à une date donnée et tente donc de tromper la police (par exemple en présentant de faux documents). L’acte de tromperie peut alors constituer une falsification de documents, même si l’erreur d’interdiction initiale (interdiction supposée des feux d’artifice) caractérisait une infraction putative.
Quel rôle joue l’infraction putative dans le contexte des causes de justification et d’excuse ?
L’infraction putative peut jouer un rôle en lien avec les causes de justification ou d’excuse, surtout lorsque l’auteur croit à tort se trouver dans une situation de légitime défense ou d’état de nécessité ou encore se conformer à une obligation légale. Toutefois, si objectivement aucune situation justificative n’existe et qu’aucune nécessité d’agir n’est établie, cette erreur conduit en règle générale à l’impunité pour absence de réalisation des éléments légaux, sans impact sur l’analyse des justifications ou excuses. La situation demeure celle d’une impunité fondamentale pour l’infraction putative – une appréciation différente n’est en général pas retenue dans ces cas.