Notion et définition juridique du bordel
Définition
Un bordel désigne un établissement exploité commercialement dans lequel des services sexuels sont proposés contre rémunération. La caractéristique principale d’un bordel réside dans le fait que la prestation est offerte régulièrement, de façon répétée, dans un local mis à disposition par l’exploitant. L’activité est le plus souvent exercée par plusieurs personnes au sein d’un cadre organisationnel structuré. Les bordels se distinguent ainsi des offres individuelles ou de la prostitution occasionnelle.
Évolution historique de la réglementation juridique
L’histoire des bordels en Allemagne et dans l’espace germanophone a été marquée par d’importants changements. Alors que la prostitution et l’exploitation de bordels étaient fréquemment régulées et taxées par l’État au Moyen Âge et à l’époque moderne, leur criminalisation et leur stigmatisation sociale ont accru à partir du XIXe siècle. Ce n’est qu’avec les réformes sociales des XXe et XXIe siècles qu’une libéralisation du cadre juridique a été introduite en Allemagne. La loi sur la prostitution (ProstG) de 2002 et la loi de protection des personnes prostituées (ProstSchG) de 2017 constituent des jalons essentiels pour l’égalité juridique et la régulation des bordels.
Cadre juridique applicable aux bordels en Allemagne
Licéité de l’exploitation d’un bordel
En Allemagne, l’exploitation d’un bordel est en principe autorisée, sous réserve de répondre à certaines exigences légales. Néanmoins, les bordels sont soumis à de nombreuses réglementations de droit public et privé. Il convient notamment de respecter les prescriptions en matière de droit commercial, d’urbanisme, d’ordre public ainsi que les dispositions sociales et fiscales. Les Länder et les communes peuvent également émettre des règles complémentaires, incluant par exemple des exigences spatiales et organisationnelles pour les bordels.
Droit commercial
L’exploitation d’un bordel est considérée comme une « entreprise » au sens de la réglementation sur les établissements commerciaux (GewO). Toutefois, elle est soumise à une obligation d’autorisation administrative particulière selon § 12 ProstSchG ainsi qu’à un contrôle de fiabilité des exploitantes et exploitants. L’enregistrement de l’activité commerciale ainsi que la délivrance d’une licence d’exploitation sont des prérequis pour l’exercice légal de l’activité.
Loi de protection des personnes prostituées (ProstSchG)
Depuis le 1er juillet 2017, la loi de protection des personnes prostituées (ProstSchG) est en vigueur. Elle réglemente de manière exhaustive les droits et obligations des personnes prostituées et des exploitants de lieux de prostitution, y compris les bordels.
Points essentiels du ProstSchG :
- Obligation d’autorisation pour l’exploitation d’un lieu de prostitution
- Contrôle de fiabilité de la personne exploitante
- Obligation de justifier des normes minimales en matière de construction, d’hygiène et d’organisation
- Obligations de déclaration et de tenue de registres
- Mesures de protection pour les personnes exerçant dans les bordels (ex : conseil obligatoire pour les personnes prostituées, protection contre l’exploitation et la traite des êtres humains)
Droit de l’urbanisme et localisation
Les bordels sont soumis aux dispositions en matière d’urbanisme conformément au Code de l’urbanisme (BauGB) et au règlement sur l’utilisation des sols (BauNVO). L’exploitation n’est généralement permise que dans certaines zones prévues à cet effet (ex : zones industrielles). Les communes peuvent, via des plans locaux d’urbanisme ou des règlements, instituer des zones d’exclusion spéciales ou imposer des distances minimales par rapport à des établissements sensibles (tels que écoles, églises, jardins d’enfants).
Droit de police et arrêtés sur les zones interdites
Certaines villes et communes adoptent des arrêtés dits « zones interdites », restreignant totalement ou partiellement la prostitution et l’exploitation de bordels dans certains secteurs. Le fondement en est le droit de police des Länder, notamment afin de prévenir les dangers et de protéger l’ordre public.
Obligations et droits des exploitants
Obligations d’autorisation
Pour exploiter un bordel, une autorisation administrative est impérative depuis l’entrée en vigueur du ProstSchG. Sa délivrance dépend de la fiabilité personnelle de l’exploitant et du respect de conditions strictes concernant le projet d’exploitation.
Obligations liées à l’exploitation d’un bordel
- Protection des mineurs : Les personnes de moins de 18 ans ne peuvent ni se trouver dans un bordel ni y travailler.
- Protection de la santé : Les prescriptions en matière d’hygiène et de conseil sanitaire doivent être respectées.
- Protection sociale : Les exploitants sont tenus d’informer toutes les personnes travaillant dans leur établissement sur leurs droits et les possibilités de protection.
- Conditions de travail : Il existe une interdiction expresse de recourir à la contrainte ou à l’exploitation de situations de détresse. Les exploitantes et exploitants doivent veiller au volontariat de l’activité et ne doivent ni imposer ni restreindre l’exercice des activités.
Obligations de documentation et de déclaration
Les exploitants de bordels doivent remplir des obligations complètes en matière d’enregistrement et de documentation. Cela inclut notamment la vérification de l’identité des personnes exerçant dans le bordel, les preuves des conseils sanitaires effectués ainsi que la déclaration des nouvelles activités auprès des autorités compétentes.
Situation du droit du travail dans les bordels
Les personnes travaillant dans les bordels exercent généralement en tant qu’indépendantes. Néanmoins, elles bénéficient de droits de protection prévus par la loi sur la protection des personnes prostituées, tels que le droit au conseil, la protection contre la discrimination et le droit à l’autonomie dans l’organisation de leur travail. En règle générale, il n’existe pas de lien de subordination dès lors que les horaires, le lieu de travail et le choix de la clientèle peuvent être déterminés de manière autonome.
Traitement fiscal
Les exploitants de bordels et les personnes y travaillant sont soumis aux obligations fiscales correspondantes. Cela concerne en particulier :
- Impôt sur le revenu ou impôt sur les sociétés
- Taxe professionnelle (dans le cas de l’exploitation d’un lieu de prostitution)
- TVA (taxe sur la valeur ajoutée) sur les recettes provenant des services sexuels
Certaines communes prélèvent également une taxe sur les divertissements pour certaines offres, notamment l’utilisation de chambres ou les droits d’entrée.
Aspects pénaux et protection contre l’exploitation
Portée pénale
L’exploitation d’un bordel devient une infraction pénale en cas de violation des dispositions légales. Sont notamment punissables :
- L’exploitation sans autorisation administrative
- Favoriser la traite des êtres humains (§ 232 du code pénal allemand)
- Prostitution forcée (§ 232a du code pénal allemand)
- Exploitation de personnes prostituées (§ 233 du code pénal allemand)
- Racket ou proxénétisme (§ 181a du code pénal allemand), en cas de recours à la violence, à la menace, à l’exploitation d’un état de dépendance ou à la contrainte
Mesures de protection
Le ProstSchG et ses règlements d’application servent tout particulièrement à la protection des personnes exerçant dans les bordels. Ils prévoient un ensemble complet de mesures de prévention visant à empêcher la contrainte, l’exploitation, la traite des êtres humains et des conditions de travail inacceptables.
Réglementations en comparaison internationale
Les pays européens diffèrent grandement en matière de réglementation des bordels. Alors que l’Allemagne et les Pays-Bas autorisent et régulent de manière poussée les bordels, des pays comme la Suède interdisent l’achat de services sexuels (dit modèle nordique). Dans certains États, les bordels sont totalement interdits (ex : France), tandis que d’autres appliquent des systèmes de licences.
Résumé
Un bordel est au sens juridique un établissement exploité commercialement pour la fourniture de services sexuels, dont l’activité en Allemagne est soumise à un large éventail de règlements légaux. Ces dispositions visent à protéger les personnes concernées ainsi qu’à garantir des processus d’exploitation réguliers, sûrs et transparents. Outre les obligations commerciales et sociales, des exigences particulières s’appliquent dans les domaines de la protection sanitaire, de la protection des mineurs et de la lutte contre l’exploitation et la contrainte. La situation juridique se caractérise par une tension entre libéralisation, régulation et lutte contre la criminalité.
Questions fréquemment posées
Quelles sont les exigences légales pour ouvrir un bordel en Allemagne ?
L’ouverture et l’exploitation d’un bordel en Allemagne sont soumises à des prescriptions légales strictes, régulées par la loi de protection des personnes prostituées (ProstSchG) ainsi que par les lois régionales concernées. Une autorisation administrative selon le § 12 ProstSchG est tout d’abord nécessaire ; elle n’est délivrée que si la fiabilité de l’exploitant est démontrée et s’il n’existe pas de faits laissant craindre un danger pour l’intérêt général. La fiabilité est notamment évaluée au moyen du bulletin de casier judiciaire et des informations provenant du registre central du commerce. L’exploitant doit en outre fournir un concept d’exploitation détaillé, précisant les services proposés, le règlement intérieur, les prescriptions d’hygiène ainsi que les mesures de protection destinées aux personnes prostituées et à la clientèle. Les exigences structurelles touchant au local sont fixées par les règlements régionaux et communaux, notamment en ce qui concerne la protection contre l’incendie, la répartition des espaces, les sanitaires et, le cas échéant, la protection contre le bruit. Par ailleurs, chaque personne prostituée travaillant dans un bordel doit être correctement déclarée auprès de l’administration et posséder une attestation de conseil sanitaire valide ainsi qu’un certificat d’enregistrement. Le non-respect de ces obligations peut entraîner l’interdiction d’exploiter et des amendes substantielles.
Quelles sont les obligations de l’exploitant d’un bordel envers les personnes prostituées travaillant dans l’établissement ?
L’exploitant d’un bordel en Allemagne est tenu de respecter les droits des personnes prostituées et de garantir leur liberté d’action. Selon le ProstSchG, il doit s’assurer que nul n’est contraint à la prostitution, et que les personnes prostituées peuvent à tout moment organiser librement leur travail et y mettre fin. L’exploitant doit également veiller à ce que toutes les personnes prostituées s’acquittent de la déclaration obligatoire et des consultations sanitaires régulières. Il a l’obligation d’assurer des mesures de protection contre la violence et l’exploitation, de mettre les informations nécessaires à disposition de tout le personnel, et de garantir des conditions de travail sûres et hygiéniques. En outre, il existe des obligations de documentation et de renseignement envers les autorités, notamment concernant les horaires de travail et les données du personnel. Il ne peut tolérer ou encourager aucun acte contraire aux bonnes mœurs ou répréhensible, et doit strictement respecter les règles sur la protection des mineurs. La violation de ces obligations peut entraîner des conséquences civiles et pénales.
Existe-t-il des particularités fiscales pour l’exploitation d’un bordel ?
Oui, l’exploitation d’un bordel en Allemagne implique des particularités et obligations fiscales. En principe, l’exploitation commerciale d’un bordel est soumise à la taxe professionnelle. Les services rendus sont en règle générale assujettis à la TVA, dont le taux actuel est de 19 %. Les exploitants doivent documenter correctement tous les revenus et dépenses et tenir une comptabilité complète. Depuis 2004, il est établi que les personnes prostituées sont soumises à l’impôt sur le revenu pour les revenus tirés de prestations sexuelles à leur compte. Une attention particulière doit être portée à la taxe dite sur les divertissements, qui, dans certaines villes, s’applique directement sur l’exploitation du bordel ou sur chaque service utilisé, voire sur la location des chambres pour les prostituées. Les modalités exactes de ces taxes locales varient selon la commune. Le non-respect des obligations fiscales peut entraîner des redressements et sanctions par l’administration fiscale.
Quelles sont les prescriptions applicables à la protection des mineurs dans un bordel ?
La protection des mineurs occupe une place particulièrement stricte dans le contexte juridique de l’exploitation d’un bordel. Conformément au § 232 du code pénal allemand (traite des êtres humains) et § 180a du même code (favoriser la prostitution), il est interdit de faire participer, sous quelque forme que ce soit, des personnes de moins de 18 ans à la prostitution, que ce soit en tant que prestataires de services, visiteurs ou employés. La présence de mineurs dans les bordels est absolument interdite. Les exploitants ont l’obligation de vérifier de manière fiable et de documenter l’âge des employés et des clients. En règle générale, le contrôle d’une pièce d’identité valide est requis. Toute infraction expose à des sanctions pénales allant jusqu’à des peines d’emprisonnement. De plus, les bordels enfreignant les prescriptions relatives à la protection des mineurs peuvent et seront fermés, et leur autorisation retirée.
Quelles prescriptions et contrôles les exploitants de bordels doivent-ils attendre ?
Les exploitants de bordels doivent s’attendre à des contrôles réguliers et inopinés de la part de différentes autorités, dont les services municipaux du commerce, la police, les services sanitaires, la douane et les administrations fiscales. Les contrôles portent sur le respect des obligations d’exploitant selon le ProstSchG, ainsi que sur les règles en matière d’urbanisme, d’hygiène, de fiscalité, de droit du travail et de protection des mineurs. L’administration contrôle notamment les attestations d’enregistrement, les preuves de conseil sanitaire et, éventuellement, les contrats de travail. En cas de non-conformités, les autorités peuvent ordonner des mesures immédiates allant jusqu’à la fermeture temporaire de l’établissement. Par ailleurs, il existe une obligation de documentation sur le personnel, qui doit être présentée à l’inspection du travail.
Quels sont les risques de responsabilité pour les exploitants de bordels ?
Les exploitants de bordels engagent leur responsabilité civile, administrative et pénale en cas de violation des lois en vigueur. Cela vaut pour l’exercice non autorisé de l’activité, l’emploi de personnes prostituées non déclarées, les infractions aux normes d’hygiène ou de sécurité incendie, ainsi qu’aux règles de protection des données et de fiscalité. La responsabilité est particulièrement lourde en cas d’exploitation, de contrainte ou de traite des êtres humains – les conséquences incluent des peines d’amende ou d’emprisonnement, le retrait de l’autorisation d’exploitation et des demandes de dommages-intérêts. Le respect des obligations d’information et la protection des données personnelles du personnel relèvent également de la responsabilité juridique ; les infractions peuvent, en vertu du RGPD, entraîner de lourdes amendes.
La publicité pour les bordels est-elle juridiquement permise et, si oui, sous quelles conditions ?
La publicité pour les bordels est en principe autorisée, mais soumise à de strictes restrictions légales. Selon le § 119 OWiG, toute publicité obscène ou choquante portant atteinte à la décence publique peut être sanctionnée comme infraction administrative. La publicité ne doit en aucun cas cibler les mineurs ni laisser entendre que des actes sexuels contre rémunération sont disponibles sans restriction. De nombreux Länder et communes définissent des règles spécifiques sur les formes de publicité autorisées, interdisant notamment l’affichage sur les façades, les panneaux ou les enseignes lumineuses dans l’espace public. La publicité pour la prestation de services sexuels par Internet, la presse ou des prospectus est cependant admise à condition de respecter la loi. Toute publicité impliquant des mineurs, des services forcés ou dangereux est strictement interdite.