Accords de soumission et procuration de soumission – Définition, qualification juridique et aspects pratiques pertinents
Définition et qualification
Le terme « accord de soumission » (également dénommé accord entre soumissionnaires) désigne des conventions juridiques entre plusieurs parties, qui coordonnent leur comportement lors du dépôt, de l’abstention ou de la fixation du montant de leurs offres dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres ou d’une enchère. La « procuration de soumission » désigne quant à elle l’autorisation formelle donnée à une personne (mandataire) de soumissionner de manière juridiquement contraignante au nom d’une autre personne dans une procédure d’enchère.
Accords de soumission
Définition et types d’accords de soumission
Les accords de soumission sont des arrangements entre des soumissionnaires potentiels ou des participants à un appel d’offres ou à une enchère. Le but de tels accords peut être d’influencer le déroulement ou le résultat d’une procédure d’attribution ou d’une vente aux enchères. Les types les plus fréquents sont :
- Ententes collusives : Plusieurs participants coordonnent leurs offres afin d’influencer de manière déloyale la concurrence.
- Ententes de cartel ouvertes ou dissimulées : Formation de cartels de soumissionnaires dans le but de maintenir artificiellement un niveau de prix élevé ou bas.
- Groupements momentanés d’entreprises (GME) et autres formes de coopération : Il convient, au cas par cas, de vérifier s’il s’agit d’un modèle de coopération légitime ou d’une entente déloyale.
Évaluation juridique des accords de soumission
Fondements du droit de la concurrence
En droit allemand et européen, les accords de soumission sont soumis à des restrictions strictes :
- Droit des cartels : L’art. 101 TFUE ainsi que les §§ 1 et 2 GWB (loi contre les restrictions à la concurrence) interdisent les ententes restrictives de concurrence. Les accords de soumission illicites peuvent entraîner de lourdes amendes et la nullité des contrats concernés.
- Droit des marchés publics : Dans le cadre des marchés publics, les accords de soumission sont explicitement interdits (§ 124 al. 1 n° 4 GWB, § 123 GWB) car ils mettent en péril une concurrence loyale et transparente.
- Aspects pénaux : Certains accords de soumission constituent l’infraction d’entente restrictive lors des appels d’offres (§ 298 StGB). La participation à un tel accord est considérée comme un délit, puni d’une peine de prison pouvant aller jusqu’à cinq ans ou d’une amende.
Conséquences civiles
Un accord de soumission illicite peut entraîner la nullité des contrats conformément à l’article 134 du BGB (violation d’une interdiction légale). Les concurrents lésés ou les donneurs d’ordre peuvent, dans certaines conditions, faire valoir des droits à réparation.
Légitimité des groupements momentanés d’entreprises
Toute participation collective à des appels d’offres ou à des enchères ne constitue pas forcément un accord de soumission interdit. Il convient d’examiner au cas par cas si un groupement d’entreprises (par exemple en construction) est effectivement requis pour garantir la réalisation de la prestation (en raison de ressources techniques, économiques ou humaines) ou s’il vise uniquement à restreindre la concurrence.
Procuration de soumission
Définition et champ d’application
La procuration de soumission est l’autorisation formelle, écrite ou orale, donnée à une personne physique ou morale de présenter des offres juridiquement contraignantes lors d’un appel d’offres, d’une vente aux enchères ou autre procédure de soumission, au nom du mandant. Elle intervient notamment lors de ventes immobilières aux enchères, d’enchères, de cessions d’entreprises ainsi que dans le cadre de marchés publics ou privés.
Conditions et exigences de forme
Les conditions requises pour une procuration de soumission sont en principe déterminées par le droit procédural applicable et les accords conclus entre les parties.
- Forme écrite : Il est souvent exigé (notamment lors des ventes judiciaires et des enchères juridiques) qu’une procuration soit délivrée par écrit.
- Signature manuscrite : Dans certaines procédures, comme les ventes immobilières forcées, une signature manuscrite est impérative.
- Acte notarié : Dans des cas particuliers, par exemple pour la vente aux enchères de biens immobiliers, une authentification notariale peut être requise (§ 29 GBO analogique), afin de garantir l’identité et les pouvoirs de disposition.
- Preuve vis-à-vis des tiers : La procuration de soumission doit régulièrement être présentée à l’organisateur ou au tribunal compétent, en particulier lorsque le droit de représentation fait l’objet d’une contestation.
Effets juridiques
Les déclarations faites grâce à une procuration de soumission sont directement et pleinement imputées au mandant (§§ 164 et suivants BGB). Le mandataire agit en qualité de représentant ; toutes les opérations juridiques – en particulier les offres contraignantes – produisent leurs effets immédiatement pour et contre le mandant.
Dépassement et abus de la procuration
Si le représentant agit en dehors ou au-delà de la procuration qui lui a été octroyée, aucune obligation n’est en principe créée pour le représenté, à moins qu’une ratification ne soit donnée ultérieurement (§ 177 BGB). En cas d’abus manifeste, une obligation de réparation du préjudice envers le mandant peut également exister.
Révocation et extinction
Une procuration de soumission peut être révoquée à tout moment conformément aux dispositions générales (§ 168 phrase 2 BGB), sauf si elle a été expressément conçue comme irrévocable. Elle prend également fin lors du dépôt d’une offre ferme, à la fin de la procédure de soumission concernée, au décès du mandant (sauf clause contraire) ou après l’attribution réussie.
Importance pratique et signification
Importance dans les relations économiques et juridiques
Les accords de soumission et les procurations de soumission revêtent une grande importance pratique dans la vie économique. Tandis que les procurations régulières de soumission facilitent la participation aux procédures formelles de soumission, les accords de soumission constituent en matière de concurrence et d’attributions des marchés un objet typique de contrôles et de sanctions en droit de la concurrence.
Compliance et obligations de prévention
Les entreprises et organisations sont soumises à des obligations de compliance étendues afin de garantir le respect du droit des cartels et du droit des marchés publics lors des appels d’offres et enchères. Cela comprend notamment :
- Documentation transparente des ententes et procurations
- Contrôle et formation concernant les dispositions relatives au droit des cartels et aux marchés publics
- Procédures internes de contrôle et d’autorisation afin d’éviter les ententes de soumission
Conclusion
Les accords de soumission et la procuration de soumission sont des notions centrales lors des appels d’offres, enchères et procédures d’attribution. Alors que les accords de soumission (en tant qu’entente entre plusieurs soumissionnaires) sont régulièrement interdits et sanctionnés, la procuration de soumission constitue un instrument licite et usuel de représentation lors des procédures de soumission. Les ententes entre soumissionnaires sont interdites si elles restreignent ou éliminent la concurrence, tandis que la procuration de soumission peut être utilisée en toute sécurité juridique sous réserve du respect des exigences formelles applicables. Une connaissance précise du cadre juridique et un contrôle régulier des processus internes de l’entreprise garantissent une utilisation légale et efficace de ces instruments dans la vie des affaires.
Questions fréquemment posées
Quelles sont les conséquences juridiques en cas de violation de l’interdiction des ententes de soumission ?
Les violations de l’interdiction des ententes de soumission, notamment dans le contexte des appels d’offres publics et procédures d’attribution, peuvent avoir d’importantes conséquences juridiques. Selon l’article 298 du Code pénal (StGB), les accords dits de soumission au détriment du donneur d’ordre constituent une infraction pénale punissable d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à cinq ans ou d’une amende. En outre, la nullité pour cause de violation du droit de la concurrence peut affecter les contrats concernés, ceux-ci pouvant ainsi être contestés ou considérés comme nuls ab initio. Les participants à de telles ententes risquent en outre l’exclusion des futures procédures d’attribution (§ 124 al. 1 no 4 GWB – loi contre les restrictions à la concurrence) et peuvent être poursuivis en justice pour réparation de dommages. Les autorités et les concurrents peuvent, en révélant les circonstances, engager des procédures pénales et civiles, et l’entreprise peut subir des dommages importants à sa réputation, affectant négativement son activité future.
Dans quels cas la délivrance d’une procuration de soumission est-elle juridiquement autorisée ou interdite ?
La délivrance d’une procuration de soumission est en principe autorisée lorsqu’il s’agit d’habiliter une tierce personne – en général un représentant d’un soumissionnaire – à présenter ou à recevoir, pour le compte du soumissionnaire, des offres juridiquement contraignantes dans le cadre d’une procédure d’attribution. La procuration doit être suffisamment déterminée et transparente afin que l’organisateur de la procédure d’attribution puisse clairement identifier qui agit au nom et pour le compte du soumissionnaire, et quels pouvoirs ont été accordés. Une procuration devient illicite lorsqu’elle est utilisée pour masquer des influences interdites, des coopérations dissimulées, des offres fictives ou d’autres ententes entre soumissionnaires. En marchés publics, cela peut entraîner la nullité des offres et éventuellement l’exclusion de la procédure d’attribution.
Plusieurs entreprises peuvent-elles se présenter ensemble comme groupement de soumissionnaires, et quelles règles juridiques s’appliquent ?
Plusieurs entreprises peuvent, sous la forme d’un groupement de soumissionnaires (groupement momentané – GME), soumissionner ensemble, notamment afin de réaliser conjointement de grands marchés. Cela est juridiquement permis, à condition que la coopération soit divulguée de manière transparente au donneur d’ordre et qu’aucune entente anticoncurrentielle ne soit conclue. Les membres du groupement sont en général solidairement responsables, sauf disposition contraire dans le contrat de consortium. Il est essentiel que la création du groupement ne vise pas uniquement à restreindre la concurrence ou à exclure d’autres candidats. Lors du dépôt de l’offre, une déclaration commune signée par tous les membres est généralement exigée. Le groupement doit aussi satisfaire aux prescriptions du droit des cartels et des marchés publics afin d’exclure tout comportement illicite au regard du droit de la concurrence.
Quelles sont les obligations des donneurs d’ordre pour détecter et empêcher les ententes de soumission dans une procédure d’attribution ?
Les donneurs d’ordre dans les marchés publics sont tenus de prendre les mesures appropriées pour prévenir et détecter les ententes de soumission. Cela implique une analyse rigoureuse des offres soumises afin d’identifier d’éventuelles irrégularités, telles que des formulations identiques, des accords de prix suspects ou la participation d’entreprises ayant des liens économiques ou personnels étroits. Des directives claires et des obligations de documentation doivent être établies concernant la soumission des offres. De plus, tout indice de collusion doit immédiatement être signalé aux commissions de passation ou aux autorités de la concurrence. L’application stricte des programmes de compliance ainsi que la formation du personnel en interne font partie des mesures préventives, tout comme la mise en place d’obligations de preuve et de déclarations relatives à l’absence d’infractions à la concurrence de la part des soumissionnaires.
Quelles exigences de forme s’appliquent à la délivrance d’une procuration de soumission ?
Les exigences de forme pour une procuration de soumission résultent généralement des cahiers des charges et conditions spécifiques d’un appel d’offres. Les pouvoirs adjudicateurs exigent souvent une procuration écrite, à remettre en original ou en copie certifiée conforme, accompagnée de l’offre. La procuration doit désigner clairement et sans ambiguïté l’étendue du pouvoir de représentation et être signée de manière contraignante par le(s) mandant(s). Dans certains cas, des exigences supplémentaires – comme une certification notariale – peuvent s’appliquer. Pour les procédures électroniques, des signatures électroniques qualifiées ou des formes numériques spécifiques de pouvoirs sont généralement requises. À défaut d’une procuration conforme, l’offre peut être rejetée.
Existe-t-il une différence entre les ententes de soumission et les formes admises de coopération entre entreprises ?
Oui, il est juridiquement essentiel de faire la distinction entre les ententes de soumission interdites et les formes de coopération permises, telles que les groupements de soumissionnaires ou les relations de sous-traitance licites. Alors que les ententes de soumission visent à restreindre la concurrence au détriment du donneur d’ordre ou du marché (par exemple par des accords de prix, des partages de marché ou des offres fictives), les coopérations sont autorisées si elles sont nécessaires à la réalisation conjointe d’une prestation et sont divulguées de façon transparente auprès du donneur d’ordre. Une coopération licite nécessite toujours la transparence et une séparation claire des comportements anti-concurrentiels, comme imposé à l’article 1 GWB et l’article 101 TFUE. Au final, l’admissibilité juridique dépend de la forme concrète et de l’objectif de la collaboration.