Arrêt de la CJUE sur la protégeabilité des médicaments dans les dispositifs médicaux : implications juridiques pour l’industrie pharmaceutique
La décision de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) du 25 octobre 2018 (aff. C-527/17) a posé des jalons essentiels pour la revendication de certificats complémentaires de protection (CCP) concernant les médicaments qui sont une partie intégrante d’un dispositif médical. Pour les entreprises des industries pharmaceutique et technologique médicale souhaitant sécuriser leurs investissements en recherche et développement, les conséquences de cette décision sont d’une importance considérable.
Fondements du certificat complémentaire de protection (CCP)
Mécanisme de protection et objectif
Le certificat complémentaire de protection est une forme de protection instituée par le droit de l’Union, permettant aux titulaires d’un brevet de médicament de bénéficier, après expiration de la protection de base, d’une période supplémentaire d’exclusivité d’exploitation. L’objectif de cet instrument est de créer un incitatif au développement de thérapies innovantes, en compensant la longueur des procédures d’autorisation.
Champ d’application du règlement (CE) n° 469/2009
Selon le règlement applicable, l’octroi d’un CCP est subordonné à l’autorisation du produit en tant que médicament à usage humain ou vétérinaire conformément aux dispositions européennes en matière d’autorisation. La finalité de la protection se limite ainsi aux produits ayant fait l’objet d’un examen et d’une autorisation autonomes au titre du droit des médicaments.
Situations impliquant des dispositifs médicaux
Association de médicament et de dispositif médical
En pratique, de nombreux produits sur le marché intègrent un médicament comme partie constitutive d’un dispositif médical – typiquement un dispositif médical enduit d’une substance médicamenteuse. Pour ces produits combinés, la réglementation de l’Union prévoit en principe une autorisation relevant du droit des dispositifs médicaux, et non du droit des médicaments, même si la substance a un effet pharmacologique.
Évaluation juridique par la CJUE
La CJUE a précisé, dans ce contexte, qu’un CCP pour un tel médicament ne peut être délivré que si celui-ci dispose d’une autorisation autonome en tant que médicament au sens du règlement. La simple inclusion d’un principe actif dans un dispositif médical autorisé conformément aux dispositions relatives aux dispositifs médicaux ne suffit pas à rendre applicable le règlement sur les CCP.
Conséquences pour la protection de la propriété industrielle
Possibilité limitée de prorogation
Les entreprises misant sur des combinaisons innovantes de médicaments et de dispositifs médicaux doivent, afin de protéger leurs droits de propriété intellectuelle, recourir plus largement à des stratégies alternatives au système des CCP. La délimitation opérée par la CJUE signifie que la protection par brevet de la composante médicamenteuse de ces dispositifs médicaux ne peut être prolongée au moyen d’un certificat complémentaire de protection, en l’absence d’une autorisation autonome en tant que médicament.
Enjeux pour la stratégie de protection
En pratique, cela entraîne une limitation significative de la prévisibilité et du calcul des investissements en recherche. Les entreprises devraient examiner attentivement les cadres réglementaires tant européens que nationaux, car le choix de la procédure d’autorisation détermine dans une large mesure l’étendue de la protection future.
Conclusion et perspectives
La décision de la CJUE illustre clairement les limites du certificat complémentaire de protection pour les médicaments utilisés dans les dispositifs médicaux. Le respect des strictes conditions d’autorisation est le critère déterminant pour la protégeabilité. Dans le contexte de la convergence croissante entre le droit des médicaments et des dispositifs médicaux ainsi qu’avec l’apparition de nouvelles formes d’innovation, l’évolution de la jurisprudence devra être suivie avec attention.
Pour les entreprises, investisseurs et autres acteurs s’intéressant aux aspects juridiques des droits de propriété dans le secteur de la santé, cela soulève diverses questions concernant les stratégies d’autorisation, de protection et de commercialisation. En cas de problématiques juridiques complexes relatives à la protection par brevet et à l’accès au marché, les Rechtsanwalt de MTR Legal peuvent fournir un accompagnement structuré et vous conseiller en tenant compte des évolutions légales actuelles.